Dans le nord-ouest des États-Unis, le parc national de
Yellowstone est célèbre pour son supervolcan et ses phénomènes
géothermiques, dont les fameuses sources chaudes. Or, des
chercheurs ont retrouvé, dans une de ces sources une bactérie
capable de respirer simultanément de l’oxygène et du souffre.
Unique, ce microbe pourrait expliquer comment certains organismes
ont survécu à la Grande Oxydation, il y a environ deux milliards
d’années.
Des bactéries contraintes de s’adapter
Les humains et de nombreux être vivants sont des organismes
aérobies, c’est à dire ayant besoin d’oxygène pour vivre. A
l’inverse, il existe aussi des organismes anaérobies, dont
le métabolisme ne dépend pas de l’oxygène, voire même pour
qui ce même oxygène est toxique. Ces organismes – des microbes en
grande majorité – puisent leur énergie dans d’autres éléments tels
que le nitrate, le sulfate ou encore, le souffre.
Durant les deux premiers milliards d’années de vie sur Terre, la
surface abritait seulement des microbes anaérobies.
Il y a environ 2,4 milliards d’années lors de la Grande Oxydation, l’atmosphère et
les océans ont progressivement été colonisés par l’oxygène. Ce
phénomène a contraint les bactéries à s’adapter,
une transition mystérieuse qu’une étude parue dans la revue
Nature Communication en janvier 2025 permet de
mieux appréhender. Des microbiologistes de l’Université d’état du
Montana (États-Unis) disent avoir trouvé une étrange
bactérie qui pourrait aider à faire la lumière sur cette
transition.
Baptisée Hydrogenobacter RSW1, la bactérie en question a été
découverte dans le fond d’une source chaude du parc national de
Yellowstone (voir photo ci-après). Or, cet organisme a suscité la
surprise en montrant une capacité à respirer à la fois de
l’oxygène et du souffre. Ainsi, la bactérie est aérobie et
anaérobie, ce qui jusqu’à aujourd’hui apparaissait comme quelque
chose d’impossible.
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Crédits : Kwiktor / iStockUn avantage évolutif au sein d’environnements instables
Dans le cadre de tests menés en laboratoire, les auteurs de
l’étude ont démontré que la bactérie RSW1 pouvait combiner
deux types de métabolisme. En l’absence, cette dernière
utilise de l’hydrogène et du souffre afin de produire du sulfure
mais ne grandit pas. Lorsque de l’oxygène est disponible, RSW1
active son métabolisme aérobie afin de croitre rapidement et ce,
tout en continuant de produire du sulfure. Il s’agit donc d’une
bactérie unique, capable d’associer deux modes
respiratoires.
Pour les chercheurs, il est possible que la bactérie parvienne à
protéger sa respiration anaérobie de l’oxygène en
ayant recours à des supercomplexes chimiques, autrement dit des
assemblages d’enzymes internes isolant et consommant rapidement le
gaz. Pour RSW1, cette double respiration assurant simultanément un
apport de deux sources d’énergies, serait un avantage
évolutif au sein d’environnements instables. Or, ces
environnements peuvent se caractériser par une présence inégale
d’oxygène, comme c’est le cas des sources chaudes du parc de
Yellowstone.
De plus, cette capacité inédite pourrait donner l’occasion de
mieux comprendre comment certains organismes ont
survécu à la Grande Oxydation. En effet, de nombreux
organismes anaérobies ont été dans l’obligation de faire face à un
environnement nouvellement toxique, si bien que seuls ceux capables
de ce type de double respiration ont pu survivre et continuer de se
reproduire.