Un pacte d’autocensure. Lorsqu’Elon Musk a découvert en lisant The European Conservative que l’ensemble des partis allemands, à l’exclusion de l’AfD, s’étaient accordés sous la pression d’une association pro-migrants à « ne pas faire campagne aux dépens des personnes issues de l’immigration vivant parmi nous » et « à ne pas tenir les migrants pour responsables des évolutions sociales négatives telles que le chômage ou les menaces à la sécurité intérieure », le sang du milliardaire américain n’a fait qu’un tour.

Lors des dernières élections législatives de février dernier, il avait déjà affiché un soutien clair au parti d’Alice Weidel. Au point qu’Olaf Scholz, encore chancelier, avait évoqué « une grave ingérence étrangère ». Aujourd’hui encore, alors que les Allemands sont invités aux urnes ce dimanche en Rhénanie du Nord-Westphalie, le land le plus peuplé d’Allemagne, le milliardaire américain récidive et s’invite dans la campagne. « Soit l’Allemagne vote pour l’AfD, soit c’est la fin de l’Allemagne », écrit-il sur son réseau social X, d’un ton définitif.

Pour l’AfD, c’est du pain béni. Un coup de pouce salutaire. À quelques pas de la cathédrale de Cologne où se tiennent ce dimanche des municipales, Wolfgang Wiehle, un député de l’AfD, acquiesce : « Musk a parfaitement raison. Sans son tweet, cela ne se serait sans doute pas su. Dans notre camp, sa prise de position a suscité beaucoup d’enthousiasme. Sa démarche est constructive. Elle va nous aider à réaliser des scores au-delà de nos espérances. »

« Il nous rend service, car l’AfD est mis en lumière »

En 2020, le parti d’Alice Weidel n’avait obtenu que 5 % des suffrages à Cologne. Selon de récents sondages, l’AfD pourrait tripler ses résultats et faire ainsi la démonstration que son implantation ne se fait plus seulement à l’est du pays, mais gagne également l’ouest de l’Allemagne. Mieux, il pourrait s’imposer dimanche dans une grande partie du bassin de la Ruhr, un ancien bastion du SPD, le parti de centre gauche allemand.

Dans les rues de Cologne, les élections municipales occupent les esprits. Et les partisans de l’AfD se montrent particulièrement optimistes quant à leurs chances de gagner encore du terrain et de poursuivre leur montée en puissance. Comme chaque semaine, plusieurs membres du parti sont rassemblés au Little Link, un bistrot de briques rouges situé dans le quartier belge, au nord-ouest de Cologne. Le retour d’Elon Musk dans la vie politique allemande fait l’unanimité. Mieux, il les réjouit. « Il sait parfaitement de quoi il parle, se réjouit Hans-Uwe, qui vote AfD depuis 2016. Le fait qu’il s’immisce dans cette campagne dérange les partis traditionnels et il nous rend service, car l’AfD est mis en lumière. » En face de lui, Jürgen K., une bière à la main, semble particulièrement nerveux. Électeur de l’AfD depuis 2019, il interrompt subitement la conversation et tape du poing sur la table : « C’est impossible que ce soit un hasard. » Il fait allusion aux décès de sept candidats de l’AfD ces dernières semaines : « Ce sont des assassinats déguisés. » Si la police a établi qu’il s’agissait de morts naturelles, les membres de l’AfD sont dubitatifs.

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Enjeu capital

Convaincus d’être persécutés par le pouvoir et mis sous surveillance des services de renseignement, le renfort médiatique d’Elon Musk est pour eux une aubaine. « Il a le don de parfaitement résumer la situation d’ensemble en une poignée de mots », confie Sven Tritschler, député de l’AfD en Rhénanie-Palatinat, depuis son bureau situé en face de la gare principale de Cologne. « Sa lucidité par rapport à la situation catastrophique de notre pays permet de prendre conscience de l’enjeu capital de cette échéance électorale. » Il se murmure même que le patron de Tesla pourrait se rendre en Rhénanie du Nord-Westphalie ce dimanche, histoire de marquer le coup en cas d’élection triomphale du parti qu’il soutient.