Par
Clément Mazella
Publié le
17 sept. 2025 à 19h08
L’une des plus grandes pépites de sa génération : voici comment est perçu depuis des années par des observateurs avertis le jeune Kalvin Gourgues. Ouvreur, centre, arrière… Le garçon, qui a débuté le rugby à 6 ans à Grenade-sur-Garonne, sait tout faire. Face à Clermont ou Perpignan, pour son premier match en pro devant le public d’Ernest-Wallon, le Toulousain a montré une partie de son talent immense. Contre l’Usap, son aisance offensive en a même bluffé plus d’un. Pourtant, Kalvin Gourgues a avoué se sentir « perplexe » face aux éloges qu’il a reçus, étant « chagriné par pas mal de choses effectuées » face aux Catalans. La preuve que le 3/4 de Toulouse est avant tout « un perfectionniste », mais aussi un gars humble. Actu Rugby l’a rencontré au sortir d’un entraînement : son discours est plein de fraîcheur et de franchise, lui qui a traversé à 19 ans une sacrée galère.
Perplexe après son match contre Perpignan
Via ses réseaux sociaux, le Stade Toulousain ne s’est pas trompé : après la victoire bonifiée contre Perpignan (31-13), le club le plus titré de l’Hexagone a sorti une petite compilation des meilleures actions du jeune Kalvin Gourgues. Il faut dire que le garçon de 20 ans, « fan de Dan Carter » quand il était jeune, a crevé l’écran, avec notamment 11 défenseurs battus ou 107m parcourus ballon en mains en 10 courses. Solide.
Les éloges, elles, furent légion. « Je suis assez perplexe », répond auprès d’Actu Rugby l’intéressé. Ah bon ? « Il y a quand même pas mal de choses qui me chagrinent sur mon match, notamment lors de la première mi-temps », appuie-t-il.
« Je suis assez frustré par mes choix en premier attaquant. J’envoie notamment deux fois Pierre-Louis Barassi à la guerre, complètement. C’est une passe « débrouille-toi, bon courage », alors que le jeu n’est pas du tout là. Il y a des fois où, dans les rucks, j’aurais pu être un peu plus fort pour éviter que le ruck ne soit chacaillé. Je rate un plaquage sur un truc tout bête : je prends l’adversaire trop, alors que je dois plonger dans les jambes ».
Pas avare au moment de décortiquer sa prestation, Kalvin Gourgues rajoute : « Sur le dernier ballon à la 79e, je me le fais gratter, alors que si je suis un peu plus dynamique au sol, ça n’arrive pas. Ce sont des petits détails qui font que mon match n’est pas réussi ». Le centre de finir son argumentaire : « J’entends les gens me féliciter, mais je sais qu’il y a beaucoup de marge de progression et il va falloir bosser dessus ». Drôle de constat.
Un perfectionniste humble
Gourgues est-il trop dur envers lui-même ? Certains se satisferaient aisément de sa production contre l’Usap pour son 6e match dans l’Élite. « Je suis assez perfectionniste », reconnaît le Toulousain. « Le plus important, c’est d’arriver à rester lucide dans les moments où c’est dur. Des fois, pendant le match, je ne l’ai pas été. Oui, j’ai gagné des duels, c’est bien, mais rien n’est encore acquis ».
Ce côté perfectionniste, il permet souvent au bon rugbyman de devenir un grand, voire très grand rugbyman. Kalvin Gourgues ne l’est pas encore, et ne prétend pas l’être. Car s’il est bien quelque chose qui transpire dans ses propos, c’est son humilité. « Ici, à Toulouse, on te fait vite perdre le melon si tu en manques », fait remarquer le 3/4 polyvalent.
Une humilité qui provient aussi de son environnement. L’entourage a tout fait pour que Kalvin, dont les qualités ont été mises en avant dès son plus jeune âge, ne se laisse pas griser. « Je n’ai jamais été dans un cadre personnel où j’ai été idolâtré, et cela m’a fait garder les pieds sur terre. Oui, je suis encouragé, mais ça en reste là. Quand certains commencent à avoir de la notoriété, ils se prennent pour d’autres. Je n’ai jamais été éduqué comme ça et je ne le deviendrai jamais. Tout mon environnement est sain, et ça m’aide vachement ».
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11 mois sans jouer
Kalvin Gourgues sait aussi par quoi il est passé. Une galère qui l’a privé des terrains durant 11 mois, alors qu’il venait de faire ses premiers matchs en pro. « J’ai eu le syndrome de l’artère poplitée piégée », reconnaît l’intéressé. Un mal qui a contraint par exemple l’ex-Toulousain Gillian Galan à stopper sa carrière à 29 ans.
« Il y avait une anomalie au genou, et la douleur se ressentait au niveau du pied et de la cheville. J’avais des fourmillements, des crampes, voire des fois une insensibilité totale. Lors de certains entraînements, je ne sentais plus mon pied au bout de 10 minutes. Je serrais les dents, je continuais, mais c’était ultra douloureux ».
Kalvin Gourgues face à Clermont lors de sa première titularisation à Toulouse : c’était en février 2024. (©Icon Sport)
En tout, Gourgues a été opéré 3 fois. « J’ai été très bien suivi par le staff médical. Le chirurgien qui m’a pris en charge a vraiment été très patient et a su donner les bonnes solutions et les bons outils pour que je m’en sorte ». Aujourd’hui, tout est rentré dans l’ordre pour celui qui a passé son permis, profité des siens et fini une formation BPJEPS rugby.
Cette période, elle a aussi fait grandir Kalvin Gourgues : « Je suis toujours resté positif pour ne pas regarder ce qu’il se passe à l’instant T, mais ce qui allait m’attendre plus tard. Je sais que ça va me servir parce que j’ai réussi à rester optimiste. Bien sûr, le rugby est ma passion et mon métier, mais la vie, elle ne s’arrête pas à ça ».
« Il y a plein de gens qui meurent tous les jours, d’autres qui vivent la guerre. Moi, ça va, je suis en bonne santé. Je fais ce que j’aime. C’est pour ça, je pense que jamais dans ma vie, je ne me laisserai abattre par quelque chose. Ce genre d’expérience, ça te fait relativiser. Ça te fait vraiment ouvrir un peu l’esprit sur des choses qui sont bien plus importantes que ça.
Kalvin Gourgues
Joueur du Stade Toulousain
C’est en raison de tout cela que Kalvin Gourgues croque à pleines dents dans le temps de jeu qu’il lui est accordé en ce début de saison. « Chaque minute sur le terrain, c’est juste un moment de bonheur. Je n’essaie pas de surjouer quand je joue pour essayer d’être vu à tout prix. J’essaie juste de jouer simple. Et de profiter ». Inspirant.
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