Délphine Ernotte, ici au mois d’août 2022, à Paris.

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Délphine Ernotte, ici au mois d’août 2022, à Paris.

MÉDIAS – Delphine Ernotte en remet une couche. Après être montée au créneau aux côtés de Sibyle Veil auprès de l’Arcom, la patronne de France Télévisions a lancé une nouvelle charge frontale contre CNews dans une interview au Monde, jeudi 18 septembre, en plein conflit entre l’audiovisuel public et les médias de la galaxie Bolloré au sujet de l’affaire Legrand-Cohen.

« Il faut admettre que CNews est un média d’opinion. Qu’ils assument d’être une chaîne d’extrême droite ! », a déclaré la dirigeante du groupe public, qui emploie pour la première fois ce qualificatif au sujet de la chaîne info, première de France en part d’audience.

Delphine Ernotte Cunci et son homologue de Radio France, Sibyle Veil, ont été entendues ce mercredi par l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel, au sujet de l’affaire Legrand-Cohen. Les journalistes Thomas Legrand et Patrick Cohen sont accusés de connivence avec le PS après la diffusion début septembre, par le magazine conservateur L’Incorrect, d’une vidéo les montrant en pleine conversation avec deux responsables socialistes.

« Il faut dire stop »

Cette affaire a provoqué un conflit inédit, à un an et demi de la présidentielle de 2027. D’un côté, les médias privés dans le giron du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, dont CNews et la radio Europe 1, accusent l’audiovisuel public de parti pris pour la gauche. De l’autre, France Télévisions et Radio France contre-attaquent et en appellent à l’Arcom et aux pouvoirs publics.

« La galaxie médiatique de Vincent Bolloré veut la peau de l’audiovisuel public, réclame sa privatisation, et l’exprime avec violence (…). À un moment, il faut dire stop », tonne Delphine Ernotte Cunci dans Le Monde.

« Ce qui m’inquiète désormais, c’est qu’une partie du personnel politique prend pour argent comptant ce qui est affirmé, et repris sur les réseaux sociaux, sans vérifier ce qui s’est vraiment passé ; c’est ce qu’on appelle la post-vérité », poursuit-elle, en faisant le parallèle avec les États-Unis de Donald Trump.

Delphine Ernotte contre la réforme de l’audiovisuel

« Complot », « infiltration », « mafia »… Très rapidement, les critiques ont fusé envers les deux journalistes après la diffusion de la vidéo, aussi bien du côté des Républicains, que du Rassemblement national et de La France insoumise. Rachida Dati, au cœur d’une des discussions de Thomas Legrand avec les cadres du PS, a pour sa part demandé que des mesures soient prises envers les deux chroniqueurs.

Interrogée sur le fait de savoir si l’audiovisuel public était suffisamment soutenu par l’État et les politiques, elle a répondu : « Je pose la question ». « Si ce soutien consiste à garantir l’indépendance de l’audiovisuel public, donc un financement pérenne, alors on ne l’a pas », a-t-elle développé, dans un contexte de fortes restrictions budgétaires.

Par ailleurs, Delphine Ernotte Cunci a affirmé qu’elle n’était plus favorable au projet de rapprochement des entreprises de l’audiovisuel public sous une holding commune, porté par la ministre de la Culture sortante Rachida Dati. « J’ai toujours défendu l’union, mais il faudrait être aveugle pour ne pas voir que les conditions ont changé. L’urgence est de donner des garanties sur notre indépendance », a expliqué la patronne de France Télévisions pour justifier ce revirement.