Les États-Unis ont de nouveau mis leur veto à une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU exigeant un cessez-le-feu immédiat et permanent à Gaza et la libération des otages, estimant que cette initiative n’allait pas assez loin dans la condamnation du Hamas.
Les 14 autres membres de l’organe le plus puissant des Nations Unies ont voté jeudi en faveur de la résolution, qui qualifiait la situation humanitaire à Gaza de «catastrophique» et appelait Israël à lever toutes les restrictions à l’acheminement de l’aide aux 2,1 millions de Palestiniens du territoire.
«Chers collègues, l’opposition des États-Unis à cette résolution n’est pas une surprise. Elle ne condamne pas le Hamas ni ne reconnaît le droit d’Israël à se défendre, et elle légitime à tort les faux discours qui profitent au Hamas et qui ont malheureusement trouvé écho au sein de ce Conseil», a déclaré Morgan Ortagus, une haute conseillère politique américaine, avant le vote.
Elle a ajouté que d’autres membres du Conseil avaient «ignoré» les avertissements américains concernant ce langage «inacceptable» et avaient plutôt adopté une «action performative visant à obtenir un veto».
Ce résultat souligne encore davantage l’isolement des États-Unis et d’Israël sur la scène internationale face à la guerre qui dure depuis près de deux ans dans la bande de Gaza.
Le vote a eu lieu quelques jours avant la réunion annuelle des dirigeants mondiaux à l’Assemblée générale des Nations Unies, où Gaza sera un sujet majeur et où les principaux alliés des États-Unis devraient reconnaître un État palestinien indépendant.
Il s’agit d’une initiative largement symbolique à laquelle Israël et les États-Unis s’opposent farouchement, ce qui divise l’administration Trump de ses proches alliés, dont le Royaume-Uni et la France.
La résolution, rédigée par les dix membres élus du Conseil pour un mandat de deux ans, va plus loin que les versions précédentes en soulignant «l’aggravation des souffrances» des civils palestiniens.
«Je comprends la colère, la frustration et la déception du peuple palestinien, qui espère qu’une aide soit en préparation et que ce cauchemar puisse prendre fin», a déclaré Riyad Mansour, ambassadeur palestinien auprès de l’ONU, dans son discours prononcé jeudi soir.
L’Algérie, l’un des pays à l’origine de la résolution, a également exprimé sa consternation face à l’échec d’une autre action du Conseil concernant Gaza, affirmant vouloir présenter des excuses aux Palestiniens pour ne pas avoir suffisamment œuvré pour sauver des vies civiles.
L’ambassadeur de l’Algérie à l’ONU, Amar Bendjama, a déclaré que, malgré l’échec de l’adoption de la résolution, «14 membres courageux du Conseil de sécurité ont fait entendre leur voix et ont agi avec conscience et au service de l’opinion publique internationale».
De son côté, l’ambassadeur du Pakistan a qualifié le vote, qui a eu lieu lors de la 10 000e réunion du Conseil de sécurité, de «moment sombre».
Le vote de la résolution de jeudi a également réitéré les exigences des résolutions précédentes, notamment la libération de tous les otages détenus par le Hamas et d’autres groupes militants à la suite de leur attaque-surprise du 7 octobre 2023 dans le sud d’Israël, qui a déclenché la guerre dans la bande de Gaza.
S’opposant à des résolutions similaires depuis novembre, les États-Unis se plaignent que ces exigences, notamment un cessez-le-feu, ne sont pas directement liées à la libération inconditionnelle des otages et ne feraient qu’enhardir les militants du Hamas.
Danny Danon, ambassadeur d’Israël auprès de l’ONU, a fustigé la nouvelle résolution, affirmant qu’elle «ne libérerait pas les otages et n’apporterait pas la sécurité dans la région».
«Israël continuera de combattre le Hamas et de protéger ses citoyens, même si le Conseil de sécurité préfère fermer les yeux sur le terrorisme», a-t-il écrit dans un communiqué jeudi.
«Profonde inquiétude»
La résolution exprimait également une «profonde inquiétude» après la publication le mois dernier d’un rapport de la plus grande autorité mondiale en matière de crises alimentaires indiquant que la ville de Gaza était en proie à la famine et que la situation risquait de s’étendre à l’ensemble du territoire sans cessez-le-feu ni levée des restrictions à l’aide humanitaire.
Les forces israéliennes ont poursuivi leur nouvelle offensive terrestre dans la ville de Gaza. Cette dernière opération israélienne, qui a débuté mardi, aggrave encore le conflit qui secoue le Moyen-Orient et rend probablement tout cessez-le-feu encore plus inaccessible.
L’armée israélienne, qui affirme vouloir «détruire l’infrastructure militaire du Hamas», n’a pas donné de calendrier pour l’offensive, mais certains éléments laissent penser qu’elle pourrait prendre des mois.
Le même jour, une équipe d’experts indépendants mandatée par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a conclu qu’Israël commettait un génocide à Gaza, publiant un rapport appelant la communauté internationale à y mettre fin et à prendre des mesures pour punir les responsables.
La semaine dernière, l’Assemblée générale des Nations Unies a voté massivement en faveur d’une solution à deux États au conflit israélo-palestinien et a exhorté Israël à s’engager en faveur d’un État palestinien.
Le veto américain à la résolution intervient alors qu’environ la moitié des Américains considèrent que la réponse militaire israélienne dans la bande de Gaza est «allée trop loin», selon un sondage de l’Associated Press-NORC Center for Public Affairs Research. Ce chiffre est en hausse par rapport à novembre 2023, où 40 % estimaient que l’action militaire israélienne était allée trop loin.
Mais parallèlement, les Américains dans leur ensemble, en particulier les républicains, sont moins susceptibles d’affirmer que la négociation d’un cessez-le-feu devrait être une priorité absolue pour le gouvernement américain qu’il y a quelques mois, lorsque les États-Unis menaient des négociations avec le Hamas.