Le ministre de l’Économie Eric Lombard s’en est pris ce dimanche aux importations massives de colis d’ultra-fast fashion, fabriqués principalement en Chine.Ils « concurrencent directement nos entreprises » et ne respectent pas toujours les normes européennes, a-t-il dénoncé, déplorant aussi leur coût environnemental.L’exécutif va annoncer des mesures à ce sujet à la fin du mois.

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La guerre commerciale de Donald Trump contre le reste du monde

En pleine tempête commerciale déclenchée par Donald Trump,  il y a un sujet avec lequel Paris pourrait bien s’aligner sur Washington. Au début du mois, le président américain a fait bondir les droits de douane américains sur les petits colis envoyés depuis la Chine. Et le gouvernement français veut lui aussi cibler l’ultra-fast fashion chinoise (nouvelle fenêtre), qui représente un « flux de marchandises considérable », a indiqué ce dimanche 20 avril le ministre de l’Économie Eric Lombard. Dans une interview au journal La Tribune Dimanche (nouvelle fenêtre), il annonce des mesures à venir à ce sujet à la fin du mois. 

« Nous nous mobilisons en France comme en Europe », a-t-il souligné, signalant « 400 millions d’objets expédiés l’an dernier », un chiffre en nette progression puisqu’il grimpe déjà à « près de 800 millions » cette année. Depuis 2010, les paquets d’une valeur de moins de 150 euros envoyés depuis un pays tiers dans l’Union européenne échappent aux taxes douanières. Dès février, la Commission européenne avait appelé à accélérer une réforme douanière pour revenir sur cette exonération, tout en réfutant toute coordination avec les États-Unis sur le sujet. 

« Alerter » sans « culpabiliser » les consommateurs

Pour cause, ces petits colis d’ultra-fast fashion, des vêtements et accessoires à prix cassé produits notamment par les géants chinois Temu et Shein, sont problématiques à plus d’un titre, a défendu le ministre. « Ces envois concurrencent directement nos entreprises et nos commerçants. Certains produits ne sont pas conformes aux normes européennes (nouvelle fenêtre) et les personnes qui les fabriquent travaillent dans des conditions incompatibles avec nos valeurs (nouvelle fenêtre)« , a-t-il fait valoir dans l’interview.

À cela s’ajoute la question environnementale : « c’est aussi une aberration écologique (nouvelle fenêtre)« , tance le ministre. « Rien qu’à destination du marché européen, ce sont 600 avions gros-porteurs qui s’envolent chaque nuit depuis la Chine ! », s’irrite-t-il, appelant à « endiguer ce phénomène ». Pour cela, il faut « alert(er) les clients européens sur les enjeux », mais « sans culpabiliser ». « Ces objets peu chers sont achetés par des consommateurs qui ont parfois peu de moyens », a reconnu Eric Lombard. 

Aux côtés de ses autres collègues ministres de Bercy, il prévoit donc une prise de parole « sur cette question » le 29 avril, « pour alerter l’opinion mais aussi pour annoncer des mesures », a-t-il expliqué. 

En France, les grandes plateformes asiatiques représentent 22% des colis acheminés (nouvelle fenêtre) par La Poste, contre « moins de 5% il y a cinq ans », a expliqué la semaine passée le patron du groupe public français, Philippe Wahl, à l’AFP. Au niveau européen, environ 4,6 milliards d’envois de faible valeur sont entrés sur le marché en 2024, à 91% en provenance de Chine, selon la Commission européenne. Le chiffre a doublé par rapport à 2023 et triplé par rapport à 2022. 

Le gouvernement ne veut pas « rompre avec la Chine » pour autant

Cet arrosage massif inquiète d’autant plus Bruxelles que les droits de douane vertigineux imposés par Donald Trump à de nombreux produits chinois, au-delà de ces petits colis, laisse craindre un report des expéditions chinoises (nouvelle fenêtre) vers le marché européen. L’UE redoute une concurrence encore accrue pour les entreprises locales. 

Eric Lombard a estimé plus largement que « le modèle exportateur chinois pose un problème économique tant aux États-Unis qu’à l’Europe », sans pour autant vouloir « rompre avec la Chine ». « Je souhaite que nous engagions des discussions en vue de rééquilibrer nos relations », a-t-il ajouté, estimant notamment que Pékin, « qui dispose de technologies de très haut niveau, peut jouer un rôle important en matière d’investissements » au sein de l’UE. 

Shein, Temu : vendent-elles des produits dangereux ?Source : JT 20h Semaine

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Dans le contexte de la guerre commerciale enclenchée par Washington, le ministre de l’Économie a par ailleurs appelé « au patriotisme des chefs d’entreprise » (nouvelle fenêtre), qui doivent selon lui « travailler avec les États » dans cette « bataille ». Plusieurs grands patrons français ont pris cette semaine le contre-pied du président Emmanuel Macron, qui avait demandé aux entreprises de suspendre leurs investissements aux États-Unis en attendant que l’Europe construise sa réponse aux taxes américaines. 

M.L. avec AFP