Quelles perspectives la réutilisation des eaux dans les entreprises du secteur alimentaire laissent-elle entrevoir, en termes d’économies d’eau ?

Les entreprises agroalimentaires bretonnes ont, grâce aux efforts de sobriété entrepris de longue date pour réduire leur empreinte hydrique, diminue leurs prélèvements de 15 % entre 2019 et 2023. Celles en capacité de traiter leurs eaux usées pour en sortir une eau de qualité potable pourront, en la recyclant pour laver les boyaux ou convoyer les petits pois sur les lignes de production, atteindre 20 à 25 % d’économies d’eau supplémentaires. Cela suppose, pour la plupart, des équipements et des adaptations.

Marie Kieffer est directrice de l’ABEA, l’Association bretonne des entreprises agroalimentaires qui compte plus de 200 entreprises adhérentes représentant plus de 50 000 salariés.Marie Kieffer est directrice de l’ABEA, l’Association bretonne des entreprises agroalimentaires qui compte plus de 200 entreprises adhérentes représentant plus de 50 000 salariés. (Photo ABEA)Justement, un an après la publication du décret élargissant les usages qui peuvent être faits de l’eau industrielle purifiée, il semble que le « re-use » ne concerne que quelques sites pilotes…

Il est trop tôt pour chiffrer les économies d’eau directement liées au décret d’assouplissement. Jusqu’aux ultimes échanges, on ne savait toujours pas, par exemple, s’il serait exigé ou non d’avoir deux réseaux d’eau séparés. Vous pensez bien que les entreprises n’allaient pas lancer des investissements aussi lourds – on parle de millions d’euros – sans savoir sur quel pied danser ! Ensuite, il y a le temps du développement, des autorisations administratives… Il ne suffit pas d’appuyer sur le bouton. Une étude de l’ABEA menée auprès de 28 IAA bretonnes a mis en lumière un potentiel de 2,5 millions de mètres cubes économisables par an – l’équivalent de 1 000 piscines olympiques.

Cela n’est donc pas du green-washing ?

Ah non ! Les entreprises agroalimentaires bretonnes représentent 14 % des prélèvements d’eau sur le territoire, derrière les usages domestiques (45 %) et agricoles (21 %). On a une responsabilité sociétale mais l’avantage qu’il y a à réduire la consommation, et donc la facture d’eau, est d’abord pour l’industriel !

Peut-on imaginer, un jour, recycler l’eau usée traitée comme ingrédient dans l’alimentaire, comme autorisé chez nos voisins belges ?

Cela n’a jamais été notre combat. On comprend les freins psychologiques à cela et, surtout, ça n’est pas du tout un sujet en Bretagne, où l’eau ingrédient n’entre qu’à hauteur de 2 % dans les produits alimentaires fabriqués.