La 57e brigade motorisée ukrainienne a diffusé le témoignage d’un ressortissant kenyan capturé sur le front, qui dit avoir été piégé lors de vacances à Saint-Pétersbourg.
Qui n’a jamais rêvé de ne pas revenir de vacances ? Evans, lui, aurait sans doute préféré ne jamais être parti. Mercredi 17 septembre, la 57e brigade motorisée ukrainienne a publié une vidéo d’un homme, qu’elle présente comme un ressortissant kenyan capturé sur le front dans l’oblast de Kharkiv. Celui qui dit s’appeler Evans et être athlète depuis plus de 10 ans, explique dans une vidéo d’une dizaine de minutes qu’il a été piégé et enrôlé de force dans l’armée russe. Tout aurait commencé lors d’un séjour à Saint-Pétersbourg pour «faire du tourisme», à une date non précisée. La veille de son retour au Kenya, Evans raconte avoir été abordé par un homme, qui lui propose de prolonger son visa et de lui trouver un travail.
Le soir même, l’homme lui présente un contrat rédigé en russe, qu’Evans s’empresse de signer. Son interlocuteur lui demande alors son passeport et son téléphone, lui promettant de lui rendre sous peu. Mais les événements se précipitent : d’autres hommes viennent le chercher en voiture et l’emmènent vers une destination inconnue. Quand il demande où il se rend, on lui répond de «se détendre». Mais quelques heures plus tard, l’athlète kenyan se retrouve dans un camp militaire. Là-bas, on lui annonce qu’il a signé un contrat avec l’armée et qu’il ne peut pas se rétracter. «Ils m’ont dit que j’allais me battre ou mourir», témoigne-t-il auprès de la 57e brigade motorisée.
«J’ai enlevé mon équipement, et j’ai fui par les bois»
«Je ne suis pas un ennemi de l’Ukraine, j’étais prisonnier de la situation», se justifie Evans. «Cette signature a ruiné ma vie». Le citoyen kenyan explique qu’il a reçu une semaine d’entraînement, où il a appris à manier une arme. Sur le camp, «il y avait une majorité de Russes, mais aussi des Biélorusses et des Tadjiks», témoigne-t-il. Il ne parle pas la langue et ne comprend rien aux instructions. Au terme de sa formation, il est envoyé directement dans une zone de combats. À ce moment-là, Evans ne réfléchit pas : «J’ai enlevé mon équipement, et j’ai fui par les bois, vers les lignes ukrainiennes», indique-t-il. «Dans l’autre sens, j’aurais été abattu». Au bout de deux jours d’errance, l’athlète tombe sur une patrouille ukrainienne qui le met en joue. Il lève les mains en l’air et explique sa situation. «Ils m’ont attaché et m’ont emmené à leur commandant. Ils m’ont donné de l’eau et de la nourriture», raconte-t-il en pleurant.
À la fin de la vidéo, Evans supplie de ne pas être renvoyé en Russie dans le cadre d’un potentiel échange de prisonniers. «Ils vont me tuer. J’ai une fille de 16 ans au pays, qui vit avec ma mère. Elle a besoin de moi», dit-il. Dans la description de sa vidéo publiée sur YouTube, la 57e brigade motorisée «souligne que l’entretien a été enregistré avec le consentement du prisonnier». «Mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une personne qui a combattu aux côtés de l’ennemi, et que c’est donc à votre discrétion de croire ou non ses paroles et ses larmes», ajoute l’unité.
Le recrutement d’Africains par la Russie pour mener sa guerre en Ukraine est loin d’être une nouveauté. Kiev a déjà annoncé la capture de mercenaires issus de plusieurs pays africains. Attirés par les promesses d’emploi et de salaires mirobolants, nombre d’entre eux s’engagent de leur plein gré, en provenance du Togo, du Nigeria, ou encore du Cameroun. Mais une autre partie est également victime de manipulation et enrôlée de force, comme l’a démontré une enquête de France 24, diffusée en juin dernier. Sans réel entraînement, ils servent souvent de chair à canon.