Flora, 49 ans aujourd’hui, a été diagnostiquée à 32 ans d’un cancer du sang aussi appelé leucémie : « J’ai été diagnostiquée pour une leucémie indifférenciée en 2008. J’ai eu des traitements de chimiothérapie, puis j’ai eu une greffe de moelle osseuse en juin 2009. Mon frère était mon donneur. Suite à la greffe, j’ai fait un rejet de greffe (de type digestive), qui a été traitée difficilement par un traitement expérimental. Un an après la greffe, j’ai eu un rejet de greffe (cette fois-ci lié au foie), qui a nécessité un long traitement. Je suis en rémission du cancer depuis ma greffe. Il me reste quelques séquelles des traitements de mon cancer : hypertension, insuffisance rénale. J’ai eu plusieurs complications durement les 3 ans d’arrêts maladie (à partir du diagnostic de la leucémie). »
Flora ressent de la colère et un sentiment d’injustice au moment de son diagnostic
C’est son compagnon de l’époque qui tire la sonnette d’alarme : « C’est grâce à mon ex petit ami que j’ai pris conscience que j’avais un problème de santé en mars/avril 2008. Il avait remarqué que je dormais beaucoup quand je passais le week-end avec lui. Puis j’ai commencé à être fatiguée et anémiée. La moindre activité physique me fatiguait, ce qui m’a occasionné quelques courts arrêts maladie au premier semestre 2008. J’avais commencé durant l’été 2008 à avoir des difficultés pour me concentrer au travail. Mon médecin traitant m’a fait faire de nombreux examens, sans obtenir de résultats et elle a fini par m’orienter au début de l’été vers un hématologue à l’hôpital Necker. J’ai obtenu un rendez-vous pour septembre 2008. Après conseil auprès de mon médecin traitant, j’ai avancé le rendez-vous à août 2008. L’hématologue qui m’a reçu en consultation m’a fait faire des bilans sanguins et m’a fait hospitaliser en urgence à l’hôpital Necker. Cette hématologue m’avait demandé lors de la première consultation si j’avais des frères et des soeurs. Cette question m’a marquée, car j’ai compris par la suite son importance, pour ma guérison. Les meilleures compatibilités pour les greffes de moelle osseuse sont obtenues avec les frères ou soeurs du patient. Mon frère était avec moi, lorsqu’on m’a annoncé que j’avais une leucémie. J’étais sous le choc et j’ai pleuré à cette annonce. J’ai eu peur, j’ai ressenti de la colère et de l’injustice. Lors des premières semaines d’hospitalisation, je pensais davantage au travail, aux projets que j’avais dû mettre de côté. J’avais commencé un projet d’accompagnement collectif au travail et je sentais que j’étais entrain de m’épanouir dans ce projet. Par ailleurs, à cette époque, avant de tomber malade, je faisais beaucoup de danse africaine et j’étais en meilleure condition physique (plus tonique, plus endurante). Quelle ironie ! »
La famille de Flora l’aide à faire face
Le frère de Flora est son aidant au quotidien : « J’ai agi durant ces 3 ans en bon petit soldat et même après. J’ai beaucoup prié pour guérir et avoir une chance de mener une vie plus à l’image de mes rêves, de mes valeurs. J’ai serré les dents et j’ai affronté les épreuves du mieux que je pouvais. Mon frère trouvait que j’étais en mode contrôle par rapport à ma maladie. Malheureusement, la volonté ne suffit pas et parfois je devais lâcher prise sur ce que la maladie me faisait. J’ai eu beaucoup de mal à accepter à certains moments, mon manque d’autonomie et le fait de devoir compter sur des soignants ou des proches pour m’aider. J’ai eu de la chance, j’étais bien accompagnée et soutenue par ma famille et mes amis durant ces épreuves. Je n’ai pas eu de difficulté financière. Je suis retournée vivre chez mes parents. J’ai pu retrouver mon emploi après ces 3 ans d’arrêt maladie. »
Cette période de maladie n’empêche pas Flora de vouloir vivre sa vie : « Mes 3 ans d’arrêt maladie, je les ai passés le plus souvent à l’hôpital, surtout à Necker, dans l’une des chambres des soins intensifs du service hématologie. Durant cette période, je me suis accordée la possibilité d’être plus spontanée, de vivre vraiment le moment présent. Je voulais avoir la possibilité de vivre comme tout le monde, même en étant malade. J’ai insisté pour maintenir un repas entre un ami, après avoir reçu une transfusion. Je me rappelle avoir chanté et dansé dans la rue avant une biopsie du foie. Ma mère voulait que j’arrête de chanter et danser, car elle avait peur qu’on me voit faire. La rue était déserte et personne d’autre ne m’a vue. J’ai fini la soirée hospitalisée et opérée d’urgence pour une hémorragie interne, peut-être liée à ma biopsie et à mon second rejet de greffe. »
Personne n’est à l’abri de developper une maladie grave, rare ou à vie. Certains et certaines passent presque du jour au lendemain de personne en bonne santé à personne malade. Ces personnes doivent apprendre à vivre avec la maladie mais aussi à s’accepter en tant que personne malade, un processus psychologique rendu parfois compliqué par l’errance médicale. La série « Malade dans la force de l’âge » revient sur ces histoires, des premiers symptômes à l’acceptation, en passant par le diagnostic.