Survivre aux conditions extrêmes de la planète Mars est
par définition quelque chose d’impossible pour des êtres humains
sans protection et infrastructures. Pour certaines bactéries, rien
de plus facile. C’est notamment le cas de Chroococcidiopsis
gigantea, une espèce de bactérie « extrémophile »
présente sur Terre.

Une des cyanobactéries les plus extrémophiles connues

Mars n’est certainement pas la planète la plus difficile sur
laquelle s’installer. En revanche, les conditions qui y règnent
sont tout de même infernales. En effet sur la planète rouge, la
température moyenne est de -63°C et l’atmosphère se compose
à 96% de dioxyde de carbone
(CO2). Citons également une
surface baignée de rayonnements ionisants et un sol riche en
perchlorates, des composés inorganiques présents naturellement dans
les dépôts de nitrate et le minerai de potasse, évidemment
hostiles à la vie.

Daniela Billi est biologiste à l’Université de Rome Tor Vergata
(Italie). L’experte s’intéresse aux extrémophiles, des organismes
dont les conditions normales de vie sont mortelles pour la
grande majorité des autres organismes
. Suivant les
espèces, ces formes de vie peuvent supporter des températures
terribles, des pressions exceptionnelles, des milieux où le sel est
omniprésent, des milieux très acides ou encore, radioactifs ou ne
contenant pas d’oxygène, entre autres.

Un organisme en particulier a retenu l’attention de la
chercheuse : Chroococcidiopsis gigantea, une des
cyanobactéries les plus extrémophiles jamais découvertes. Dans le
cadre d’une étude à paraitre dans la revue Acta Astronautica en janvier
2026, la bactérie a été observée dans certaines régions désertiques
d’Asie, d’Amérique du nord mais également en Antarctique. Dans les
faits, C. gigantea est un micro-organisme
photosynthétique, c’est à dire capable de produire de
l’oxygène grâce à la lumière du soleil.

bactérie Chroococcidiopsis gigantea
Une colonie de bactéries Chroococcidiopsis gigantea.
Crédits : T. Darienko / WikipediaUne bactérie à toute épreuve

D’une manière générale, les extrémophiles sont
essentiels en astrobiologie
, permettant d’étudier les
possibles formes de vie présentes sur d’autres planètes, des lieux
que les humains jugent logiquement hostiles. La bactérie C.
gigantea a déjà fait l’objet de deux expériences dans le
module EXPOSE de la Station Spatiale Internationale (ISS). Les
résultats avaient permis de découvrir que les rayons UV incarnaient
la principale menace pour cet organisme. En revanche, une fine
couche de roche est suffisante pour assurer sa survie. Par
ailleurs, la bactérie est également résistante au vide spatial. De
retour sur Terre, le micro-organisme s’est réadapté à la
vie sur Terre facilement
, en renouvelant son ADN avoir
besoin de mutations supplémentaires.

De plus, C. gigantea a résisté à des doses de
rayonnement gamma 2 400 fois supérieures à celles auxquelles les
humains peuvent survivre. Même résistance en ce qui concerne des
températures extrêmes autour des -80°C. Dans de
telles conditions, la bactérie se place dans un état de dormance
réversible lorsque l’environnement redevient moins difficile.
Surtout, C. gigantea est capable de pousser sur le
sol martien
(et lunaire) et ce, tout en produisant de
l’oxygène via le processus de photosynthèse.

Enfin, l’organisme est donc au cœur de plusieurs travaux à
venir, à savoir deux missions de l’Agence Spatiale
Européenne (ESA)
. La première a été baptisée
CyanoTechRider, dont l’objectif est de comprendre les effets de la
microgravité sur ses mécanismes de réparation de l’ADN. La seconde,
nommée BIOSIGN a pour but de tester sa capacité à utiliser la
lumière infrarouge dans le cadre du processus de photosynthèse.