Huit bras, une infinité de possibilités… et pourtant, les pieuvres ne s’en servent pas au hasard. Une récente étude révèle que ces maîtres du camouflage privilégient certains membres pour des tâches bien précises. Une découverte qui éclaire autant le monde marin que la robotique.
Alors que l’être humain peine parfois à synchroniser deux pieds sur une piste de danse, les pieuvres coordonnent sans effort huit membres ultraflexibles. Elles s’en servent pour chasser, construire des refuges ou se déplacer sur le fond marin.
Pour comprendre cette étonnante dextérité, des chercheurs du Laboratoire de biologie marine de Woods Hole, aux États-Unis, ont analysé 25 vidéos d’une minute, filmées entre 2007 et 2015 sur six sites variés, de la côte de Vigo en Espagne jusqu’aux îles CaïmansCaïmans.
Vingt-cinq pieuvres sauvages de trois espèces ont ainsi été passées au crible. Chaque séquence a été scrutée pour identifier les comportements (se nourrir, marcher, manipuler un objet) mais aussi les micro-mouvementsmouvements des bras : enroulement, extension, torsiontorsion ou flexionflexion.
Les bras avant, véritables « mains de service »
Au total, les scientifiques ont catalogué 15 comportements et 12 actions de bras distinctes. Ils ont constaté que plusieurs mouvements pouvaient se combiner simultanément sur un même membre ou entre membres adjacents, preuve d’une agilité extrême. Tous les bras sont capables de chaque action, mais une préférence nette se dégage : 61 % des mouvements observés impliquent les bras avant, contre 39 % pour les bras arrière.
Les deux paires de bras antérieurs sont particulièrement sollicitées pour attraper, soulever, abaisser ou se recroqueviller. À l’inverse, les bras postérieurs sont davantage mis à contribution pour des actions de locomotion comme « l’échasse », lorsque le corps repose sur les bras, ou le « roulis », un mouvement de type tapis roulant.
Des implications au-delà des océans
Si les pieuvres n’affichent pas de préférence droite ou gauche, cette organisation avant/arrière ouvre une fenêtrefenêtre inédite sur la manière dont elles orchestrent leurs huit appendices pour réaliser des tâches complexes.
Pour Kendra Buresch, co-autrice de l’étude parue dans Scientific Reports, ces démonstrations de souplesse et d’adaptabilité intéressent bien au-delà de la biologie marine : elles pourraient inspirer les neurosciences, l’éthologie sensorielle et la robotiquerobotique, notamment pour concevoir des robots aux appendices souples dotés d’une agilité tout aussi spectaculaire.