Le site est situé juste à côté de la «Data center alley», en Virginie, qui présente la plus forte densité au monde de centres de données avec près de 600 déjà opérationnels ou en projet. Le distributeur français entend se positionner sur ce marché en pleine explosion avec le développement de l’intelligence artificielle. Car ces chantiers pharaoniques consomment des kilomètres de câbles, mais aussi des interrupteurs, transformateurs… «Il y a une accélération incroyable des investissements. Or ce sont, avant tout, des bâtiments dotés de matériel électrique. On doit s’organiser pour les servir partout», détaille Philippe Delpech, le président de Sonepar depuis les locaux de sa filiale Capital Electric, à l’occasion d’un voyage de presse.


En 2025, le groupe familial devrait réaliser près de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires sur le marché des datacenters aux États-Unis. Un chiffre qu’il compte multiplier par trois d’ici à 2030. Aux États-Unis, le distributeur français est déjà un gros acteur de la distribution de matériel électrique. Il y détient déjà 7% de part de marché après avoir bouclé une quinzaine d’acquisitions en quatre ans, dont cinq pour la seule année 2024. C’est moins qu’en Europe, où il dispose de 15% de parts de marché. Mais les activités américaines pèsent déjà la moitié de ses 32 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2024, et une part encore plus importante de ses bénéfices. Ces derniers mois, les centres de données ont constitué son principal relais de croissance, avec la demande pour les bâtiments industriels, tirée par les projets de relocalisation d’usines. À l’inverse, la construction résidentielle souffre à cause des taux d’intérêt toujours élevés.


Localisation dans des zones rurales 


Pour servir les projets des Google, Microsoft et consorts, Sonepar a dû réajuster son implantation aux États-Unis. Les nouveaux projets d’hyperscalers, ces centres de données qui offrent d’énormes puissances de calcul, essaiment sur tout le territoire américain. Ils privilégient de plus en plus les zones moins densément peuplées, où la production d’électricité est abondante et les prix du foncier et de l’eau moins élevés… Mais la logistique plus compliquée.  À Washington D.C., les prix de l’électricité ont bondi de 18% en septembre, à cause de la pression croissante sur les réseaux. Une hausse loin d’être inédite sur la côte est, alors que les énergéticiens vont devoir investir massivement pour suivre la hausse de la demande électrique. Sonepar a passé au crible les centaines projets connus de datacenters sur le territoire. Il a identifié neuf zones, comme l’Arizona ou le Nouveau-Mexique, où il va devoir renforcer sa présence avec de nouveaux sites logistiques pour répondre aux besoins des centres en construction.


Au-delà, Sonepar veut aussi se renforcer dans la partie «blanche» des datacenters, qui concerne les branchements électroniques et les serveurs. Le groupe cherche à y faire des acquisitions ciblées sur ce marché où il est encore peu présent. Le marché des fusions acquisitions a fortement ralenti aux États-Unis depuis le début de l’année. «Mais les brokers nous contactent à nouveau depuis l’été», pointe Rob Taylor, le président de Sonepar Americas.


De nouveaux services réclamés par les Gafa


Le distributeur estime avoir des atouts pour se renforcer sur ce marché gigantesque. Il a déjà largement automatisé sa chaîne logistique, comme dans son centre d’Upper Marlboro. D’autres doivent suivre à Las Vegas ou Charlotte en Caroline du Nord. Passées avant 21 heures, les commandes des électriciens sont livrées dès le lendemain matin à six heures du matin sur les chantiers ou les agences locales de la région, par la flotte de camions possédée par le distributeur. «L’Europe s’est mise plus tôt à cette automatisation, car la main d’œuvre y est plus chère et moins flexible. La plupart des distributeurs américains que nous consolidons n’avaient pas les moyens de faire ces investissements dans le digital», pointe Philippe Delpech.


Au vu du gigantisme des chantiers des hyperscalers, les Google, Microsoft et consorts réclament de nouveaux services. «Ils veulent que les spécifications des différents câbles soient mieux identifiées dans nos usines, pour optimiser leurs processus et limiter les tâches réalisées sur le chantier», décrit Rick Stinson, le PDG du fabricant américain de câbles Southwire, troisième producteur mondial, et fournisseur de Sonepar. Pour la même raison, «les grands acteurs préfèrent avoir affaire à des groupes de premier plan. Ils ne veulent pas multiplier le nombre de leurs fournisseurs», résume l’industriel américain. Or, la vague des datacenters déjà lancée aux États-Unis, devrait finir par arriver aussi en Europe. En France, 109 milliards d’euros d’investissements ont été annoncés lors du sommet IA, début janvier. Un juteux business en vue pour tous leurs fournisseurs.