SAUL LOEB / AFP
C’est accompagné de son ministre de la Santé antivaccination que Donald Trump a multiplié les fake news et les approximations sur l’autisme lors d’une conférence de presse sur le sujet.
INTERNATIONAL – Parole débridée. C’est sans prendre la moindre pincette et sans l’ombre d’une rigueur scientifique que le président américain Donald Trump a conseillé ses concitoyens en matière de médicaments lors d’une conférence de presse organisée à la Maison Blanche sur un sujet qui semble beaucoup préoccuper le chef d’État américain.
Après avoir placé Robert Kennedy Jr., un antivax, à la tête du ministère américain de la Santé lors de son arrivée au pouvoir, Donald Trump a profité de cette prise de parole dédiée à l’autisme et organisée ce lundi 22 septembre pour prodiguer conseils et avertissements médicaux. Sauf que certains posent vraiment problème.
Premier exemple : Donald Trump a fortement déconseillé le paracétamol aux femmes enceintes, l’associant à un risque d’autisme élevé pour les enfants en dépit d’avis contraires des médecins. Avant de jeter un discrédit infondé sur les vaccins. « N’en prenez pas » et « n’en donnez pas à votre bébé », a insisté le président américain.
« Selon une rumeur − et j’ignore si c’est le cas − ils n’ont pas de paracétamol à Cuba car ils n’ont pas de quoi s’offrir de paracétamol. Eh bien ils n’ont quasiment pas d’autisme », s’est-il permis d’avancer. Une fake news en bonne et due forme puisque le paracétamol (ou acétaminophène) est présent dans le doliprane, le dafalgan ou encore le tylenol (aux États-Unis ou au Canada) et est recommandé aux femmes enceintes contre la douleur ou la fièvre. D’autres médicaments comme l’aspirine ou l’ibuprofène sont quant à eux contre-indiqués, notamment en fin de grossesse.
« Épidémie d’autisme »
Ces quelques phrases du locataire de la Maison Blanche ont suffi à raviver les plus grandes craintes de la communauté scientifique. Car ses propos sont « dangereux » et truffés « de fausses informations », note pour l’AFP Arthur Caplan, professeur au NYU Langone Medical Center. « J’ai peur que les femmes enceintes se sentent coupables d’avoir pris du paracétamol. Elles vont avoir l’impression d’avoir laissé tomber leur bébé », s’inquiète-t-il.
Pourtant, un tel risque n’est pas établi, selon des experts. Et si des études ont déjà pointé une potentielle implication, d’autres ont au contraire écarté toute causalité entre le paracétamol et l’apparition de l’autisme. Pour David Mandell, un professeur en psychiatrie à l’université de Pennsylvanie et spécialiste de l’autisme, il s’agit simplement d’« une mauvaise analyse » des travaux déjà publiés sur la question. « On sait que la fièvre (…) peut augmenter le risque de retard et de troubles du développement neurologique », pointe-t-il. « Il faut donc être très prudent lorsqu’on essaie de déterminer lequel de ces deux facteurs est responsable de l’augmentation du risque d’autisme. »
D’autant plus que ce trouble, qui est complexe et au spectre large, est étudié depuis des décennies. Pourtant, Donald Trump avait promis durant sa campagne et ses premières semaines à la Maison Blanche qu’il révélerait un temps record les causes de ce qu’il qualifie d’« épidémie d’autisme ». Si les cas d’autisme ont augmenté ces dernières décennies aux États-Unis, nombre de scientifiques rejettent l’existence d’une épidémie.
En revanche, tous mettent en exergue les améliorations des diagnostics, favorisant la découverte de cas qui pouvaient facilement passer sous les radars dans le passé. Quant à son origine, les scientifiques ont montré que la génétique jouait un rôle important. Par ailleurs, certains facteurs environnementaux ont également été mis en avant, comme la neuro-inflammation ou la prise de certains médicaments comme l’anti-épileptique dépakine durant la grossesse.
Pas de risque d’hépatite B pour les bébés
Loin d’être rassasié sur le sujet, Donald Trump a préféré rechercher les causes de l’autisme du côté des vaccins. Il a d’ailleurs appelé à modifier le calendrier vaccinal des enfants. Son idée ? Affirmer que ceux qui ne faisaient pas vacciner leurs enfants et ne leur donnaient pas de médicaments n’avaient pas d’autisme.
Présent à ses côtés, son ministre de la Santé Robert Kennedy Jr a surenchéri en accusant la recherche d’avoir été « activement étouffée par le passé ». Rien de surprenant, quand on sait que le neveu de l’ancien président a lancé une profonde refonte de la politique vaccinale américaine et a nommé à la tête des travaux sur l’autisme… un chercheur discrédité et convaincu d’un tel lien.
L’annonce de lundi ne devrait donc être que la première d’une longue série. D’autant que Donald Trump, qui n’est pas médecin rappelons-le, a également estimé qu’il n’y avait « aucune raison de vacciner contre l’hépatite B un bébé qui vient à peine de naître ». Selon lui, « l’hépatite B se transmet par voie sexuelle » uniquement. Il a plutôt conseillé auxAméricains « d’attendre que le bébé ait 12 ans et soit bien développé » avant de le vacciner contre l’hépatite B. En guise de rappel, les États-Unis, comme de nombreux autres pays recommandent la vaccination des nouveau-nés contre l’hépatite B pour la simple et bonne raison que la mère peut, durant la grossesse ou l’accouchement, contaminer son enfant.