Par
        
            Emilien Jacques
        
Publié le
23 sept. 2025 à 10h30
Incarcéré depuis le mercredi 30 juillet 2025, c’est derrière la vitre du box des détenus que se présente Romain*, devant le tribunal de Rouen, le lundi 22 septembre 2025. Dans la salle, sur le banc des prévenus, sa conjointe Sandra*, sous contrôle judiciaire, comparait également. Les faits qui sont reprochés aux deux habitants de Cléon (Seine-Maritime) âgés de 40 et 39 ans sont graves : vol, violences, menace de crime et rébellion pour Romain, rébellion pour Sandra. La juge leur rappelle les faits, qui débutent tôt le matin avec une altercation entre voisins, et se terminent en fin de journée par l’intervention du RAID.
Querelle de voisinage et vol de chien
Il est aux alentours de 8 h, dans un quartier de Cléon, lorsque Romain croise la route de son voisin Xavier*, le 30 juillet. Il affirme à la barre avoir déjà eu un différend il y a un an avec ce dernier. « Je suis venu lui rappeler l’histoire qu’on a eue », dit-il. S’ensuit une violente altercation.
Xavier, un chaudronnier d’une cinquantaine d’années, reçoit un coup à la tête qui lui vaudra deux jours d’incapacité temporaire totale. « Je ne sais pas pourquoi il m’a agressé », raconte-t-il sur le banc des victimes. Les deux hommes s’accusent mutuellement d’avoir porté le premier coup.
Xavier est accompagné ce matin-là de sa chienne. Après avoir reçu le coup à la tête, il explique avoir regagné son appartement pour se soigner. Pendant ce temps, Romain en aurait profité pour lui voler son animal. « Je n’ai pas volé sa chienne », se défend l’accusé qui, au moment des faits, est très fortement alcoolisé. « C’est la chienne qui m’a suivie chez moi. »
De voleur à forcené
En réalité, ce n’est pas chez lui que l’homme emmène le chien de son voisin mais chez sa compagne, Sandra, qui vit avec son fils, un adolescent atteint de troubles autistiques. Lorsqu’elle voit débarquer son conjoint, alcoolisé, et avec un animal qui ne lui appartient pas, elle ne réagit pas outre mesure.
Avec un détachement déconcertant et un positionnement que même son avocate décrira comme « complètement déroutant », elle raconte à la barre ne s’être à aucun moment de la journée sentie menacée, ni pour elle, ni pour son fils.
Pourtant, à ce moment, tout bascule. Romain est incontrôlable, et lorsque Xavier se présente devant sa porte avec deux policiers pour récupérer son chien, il les asperge d’essence puis bloque la porte avec toutes sortes d’objets. Puis il continuera à jeter de l’essence sur sa porte en menaçant de « tout faire péter ».
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Intervention du RAID
La situation est au point mort et les policiers présents laissent place, de manière exceptionnelle, à l’unité d’élite de la police nationale française, le RAID. Ne pouvant pas ouvrir la porte obstruée, ils décident d’entrer en cassant une fenêtre. Il est 16 h.
Dans leurs dépositions, les agents du RAID, absents à l’audience, ont affirmé avoir reçu une violente opposition de la part de Romain et Sandra, recevant de nombreux coups de poing et coups de pied. Ils parviennent finalement à maîtriser Romain en usant, eux aussi, de la force.
« J’avais un peu bu »
À la question de la juge, « comment expliquez-vous qu’une altercation avec un voisin finisse avec l’intervention du RAID chez vous ? », Romain balbutie.
Je ne sais pas pourquoi je n’ai pas ouvert à la police. J’ai des flashs, j’avais un peu bu.
Romain
Durant ce procès, la question de la consommation d’alcool de Romain est abordée. La juge rappelle qu’il lui a été diagnostiqué durant son séjour en prison un trouble de la personnalité psychopathique renforcé par l’alcool.
Lui, affirme à la barre avoir arrêté l’alcool et la drogue depuis plusieurs années. Or, ce jour-là, il dit avoir « rechuté », ce qui expliquerait ses actes selon lui : « J’ai bu une fois, un soir, et ça m’a amené ici. »
Son avocate souligne dans sa plaidoirie l’importance de sa relation à l’alcool. « Lorsqu’il arrête la consommation de drogues et d’alcool, il n’y a plus d’infractions », assure-t-elle, faisant référence à certains délits de Romain datant d’il y a une dizaine d’années, sous emprise d’alcool. Selon elle, « sa place n’est pas en détention. Il ne pourra pas se soigner ».
L’accusé restera en prison
Durant le procès, la juge fait sortir deux fois Romain de la salle à cause de ses interventions inopinées durant les témoignages de Sandra et de Xavier. Lorsque vient l’heure des réquisitions, la procureure souligne « l’écart impressionnant entre la situation et les explications des deux prévenus », qui semblent, dans chacun de leur propos et leurs comportements, n’avoir jamais saisi la gravité des faits.
Toutes les infractions retenues sont caractérisées. Les violences sont évidentes, les menaces sont évidentes.
La procureure de la République
Deux ans de prison dont six mois avec sursis sont requis contre Romain et six mois de prison avec sursis contre Sandra.
Après délibérations des juges, ce sont ces mêmes peines qui sont prononcées à l’encontre des deux accusés, qui ont été reconnus coupables des faits qui leur étaient reprochés. Avec, pour Romain, une interdiction de paraître sur les lieux des faits, une interdiction de contact avec la victime Xavier et une obligation de soins.
Il devra également s’acquitter d’une somme de 800 euros envers Xavier, de 500 euros envers chacun des deux policiers ayant reçu de l’essence et de 200 euros envers l’agent du RAID victime de coups, en guise de dommages et intérêts.
*Les prénoms ont été modifiésCette décision de justice est encore susceptible d’appel. Tout justiciable demeure présumé innocent tant que toutes les voies de recours n’ont pas été épuisées.
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