- Donald Trump a déclaré que l’Ukraine pouvait « regagner son territoire » occupé par la Russie et « peut-être même aller plus loin ».
- Pourtant, au début de l’année, le président américain estimait que son homologue ukrainien « n’avait pas les cartes en main » dans ce conflit.
- Pour Jean de Gliniasty, directeur de recherches à l’IRIS, Donald Trump poursuit sa stratégie de « la carotte et du bâton » vis-à-vis de Vladimir Poutine.
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Ukraine-Russie : des négociations dans l’impasse
Nouvelle volte-face de Donald Trump. Après avoir longtemps martelé que la Russie dominait militairement l’Ukraine, le président américain a estimé mardi 23 septembre que Kiev pourrait « avec du temps, de la patience et le soutien financier de l’Europe et en particulier de l’Otan (…) regagner son territoire dans sa forme originelle et peut-être même aller plus loin » face à Moscou. « Cela fait trois ans et demi que la Russie mène sans direction claire une guerre qu’une Vraie Puissance Militaire aurait remportée en moins d’une semaine », a lancé Donald Trump sur son réseau Truth Social.
Mais peut-on parler d’un changement de position du président américain ? Pas vraiment, selon Jean de Gliniasty, directeur de recherches à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) et ancien ambassadeur de France à Moscou, qui voit là une suite « cohérente » à la stratégie adoptée par Donald Trump depuis son arrivée à la Maison Blanche.
« Je ne parle pas d’un changement de position. Dès le départ, Donald Trump avait envisagé des pressions sur la Russie, et il avait manifesté son mécontentement au bout de plusieurs entretiens avec Vladimir Poutine, expliquant que ça ne se passait pas très bien. Il avait demandé aux Européens de faire pression, et ils n’ont pas agi contre son vœu en présentant dernièrement leur 19ᵉ paquet de sanctions contre la Russie », explique l’auteur de « Géopolitique de la Russie. 40 fiches illustrées pour comprendre le monde ».
« Un changement d’attitude vis-à-vis de Volodymyr Zelensky »
« Donald Trump a toujours envisagé vis-à-vis de la Russie la carotte et le bâton », poursuit le spécialiste. Dernièrement, Vladimir Poutine n’a pas saisi les opportunités de négociations de paix avantageuses adressées par Donald Trump. Il y a peu, Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, parlait même d’efforts de paix dans l’impasse, le rapprochement entre Moscou et Washington ayant mené à des résultats « proches de zéro ».
En se remettant du côté de l’Ukraine et en pointant l’incapacité de la Russie à gagner une guerre qu’une « vraie puissance militaire aurait remportée en moins d’une semaine », Donald Trump est de nouveau « dans la phase bâton après la phase carotte ». Le président américain en vient même à comparer le pays de Vladimir Poutine à un « tigre de papier ». « C’est dans le style de Trump, c’est une manifestation de son agacement devant le refus des Russes » de négocier, analyse Jean de Gliniasty.
Pourtant, Volodymyr Zelensky lui-même a salué un « tournant » après la déclaration en ligne de Donald Trump. « Il avait dit au président ukrainien qu’il n’avait pas les cartes en main, or là il lui dit qu’il peut réussir à reprendre ses territoires, voire plus. Donc il y a un changement d’attitude vis-à-vis du président ukrainien, il n’est plus considéré comme un perdant, donc de son point de vue c’est un tournant », abonde l’ancien ambassadeur.
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Le président américain n’a toutefois rien dit du rôle que les États-Unis joueraient dans la suite du conflit, qu’il s’agisse de sanctionner la Russie, de soutenir Kiev ou de faire office de médiateur. « Il ne fera rien qui nuira au flux d’affaires des États-Unis » et « il s’est engagé à ne plus aider financièrement l’Ukraine, c’est une promesse de campagne », réplique Jean de Gliniasty.
En réaction aux dernières déclarations de Donald Trump, la Russie a assuré que l’Ukraine n’était pas en mesure de reprendre des territoires face à son armée et qu’elle entend poursuivre son assaut débuté en 2022. « Nous poursuivons notre opération militaire spéciale pour assurer nos intérêts et atteindre les objectifs que (…) le président de notre pays a établis dès le début » a assuré Dmitri Peskov. « Nous n’avons pas d’autre alternative ».
Emilie ROUSSEY
