Bénies soient les mutuelles niortaises ! Elles permettent à la capitale deux-sévrienne de ne pas être dans l’œil du cyclone de la Cour des comptes et de son rapport – critique – sur la gratuité des transports publics. Grâce à la concentration sur son territoire des sièges d’assureurs et aux recettes générées par le versement mobilité pesant sur les entreprises, la ville aux 60 000 habitants peut se passer de la billetterie des bus depuis huit ans. Et elle ne reviendra pas en arrière. La fréquentation est en hausse : six millions de voyages en 2025 contre trois en 2016, selon la municipalité. Pour le maire centriste Jérôme Baloge, la gratuité a un impact sur le pouvoir d’achat. « Le réseau payant c’était 300 € par an en 2016. »

« Une avancée sociale »

À 840 km de Niort, Aubagne (47 000 habitants, Bouches-du-Rhône) tire aussi un bilan positif des bus et tramways gratuits. Seize ans que cela dure. Une décision partagée par les onze autres communes de l’ex-agglomération. « Cette gratuité permet d’offrir une liberté de mouvement », souligne le maire LR Gérard Gazay, malgré un manque à gagner d’un million d’euros chaque année, compensé par la métropole Aix-Marseille. Signe que l’exemple aubagnais porte ses fruits, les 80 autres communes de la métropole ont, à leur tour, rendu les transports gratuits depuis peu, pour les moins de onze ans et les 65 ans et plus. Soit 750 000 habitants.

Début septembre, Rouen (Seine-Maritime) a également mis ses bus et tramways gratuits pour les moins de dix-huit ans. « Une avancée pour le pouvoir d’achat et l’écologie », note le maire socialiste Nicolas Mayer-Rossignol. « Résultat ? Déjà + 30 % de fréquentation ». La perte de recettes – 4,3 millions par an – a été compensée par une renégociation de la délégation de service public. « On a dégagé dix millions d’euros d’économies par an. » Rouen pratique aussi la gratuité pour tous le samedi.

Retour en arrière

Cette avancée sociale plébiscitée par Rouen est partagée par Dunkerque. La ville du Nord et les seize communes alentour (200 0000 habitants) appliquent la gratuité des bus pour tous depuis 2018. Un choix politique et budgétaire assumé. « On privilégie dix-sept millions d’euros sur la mobilité plutôt que d’autres investissements. Le bilan est positif : + 155 % de fréquentation des bus en sept ans, des habitants qui revendent leur deuxième voiture », explique Jean-François Montagne. Pour l’élu, aucun rétropédalage n’est prévu.

Ce retour en arrière du gratuit au payant, Cluses (Haute-Savoie) a été contrainte de le faire. C’était en 2017 lors de l’extension du réseau de transport à toute la communauté de communes. Même punition à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence) voilà six ans, au moment de la création d’une desserte dans le périmètre de l’agglomération. « Nous sommes un département rural, avec de grandes distances. Le paiement était une nécessité », explique-t-on à l’Agglo. Laquelle veut retravailler l’offre de transport après le scrutin municipal de mars 2026, afin de maintenir les tarifs actuels et d’étendre la fréquentation – encore timide – des bus.