Par
Cédric Nithard
Publié le
25 sept. 2025 à 18h07
En cette journée nationale d’hommage aux harkis, la Ville de Montpellier a tenu ce jeudi 25 septembre une cérémonie au square Suzanne Babut. L’occasion d’honorer la mémoire de ces Algériens qui ont combattu aux côtés de la France pendant la guerre d’Algérie et oubliés par la suite.
« Regarder l’Histoire en face »
« La guerre d’Algérie occupe une place particulière dans l’Histoire de France et l’histoire collective. Pour beaucoup, elle demeure une blessure encore vive, une page qui ne s’est pas refermée, une histoire fragmentée et douloureuse » résume Fatma Nakib, représentant le maire Michaël Delafosse. En ce jeudi 25 septembre, dans le square Suzanne Babut en présence notamment du sénateur Jean-Pierre Grand et du député Jean-Louis Roumégas, il est question d’honorer la mémoire des 25 000 harkis et membres des formations supplétives morts pour la France mais également tout ceux qui ont quitté leur pays en étant ensuite oubliés par la République.
Cliquez ici pour visualiser le contenu
« L’historien Benjamin Stora rappelle que la mémoire n’est pas un héritage figé, elle est un travail parfois douloureux qui engage à regarder l’Histoire en face. Ces paroles montrent combien il est urgent de briser ces silences, de restituer la vérité et de rendre leur part à celles et ceux dont les noms ont été longtemps effacés » enjoint l’élue, déléguée à l’Égalité et droits des femmes, en soulignant : « Cette reconnaissance est venue tardivement et beaucoup ont connu l’exil, les camps, l’indifférence et le mépris. Soixante-trois ans après, nous avons le devoir de regarder les blessures du passé avec lucidité et de construire une réconciliation durable des mémoires fondées sur la vérité historique qui ne pourra pas se faire sans la jeune génération et en associant pleinement les descendants de harkis ».
Un droit à la réparation
C’est en partie justement le sens de la loi du 23 février 2022 qui a ouvert un droit à réparation, attendu de longue date, dans laquelle sont reconnues les responsabilités de la France notamment les conditions d’accueil et de vie indignes des harkis et leurs familles rapatriés d’Algérie après les accords d’Évian de 1962. Jusqu’à présent, plus de 27 000 demandes ont été étudiées pour un montant de près de 176 000 000 € comme l’a mis en avant la Commission nationale indépendante des Harkis dans son rapport d’avril 2025. Cette réparation n’étant à l’origine cependant ouverte qu’aux personnes ayant séjourné dans des camps de transit et de forestage entre 1962 et 1975, un amendement du 3 septembre dernier a élargi le nombre de site ayant accueilli des harkis ouvrant la réparation à 6 000 bénéficiaires. À Montpellier cela concerne les 24 familles de harkis logés dans le bidonville de la Cité Redon de 1964 à 1972 logées ensuite en 1976 à la Cité de la Grappe et aux 70 harkis ayant participé à la construction du zoo du Lunaret entre 1963 et 1964.
Vidéos : en ce moment sur Actu
Un sujet particulièrement porté par la montpelliéraine Patricia Mirallès, ministre démissionnaire de la Mémoire et des Anciens combattants, ce jour à Paris. Véronique Martin Saint-Léon, sous-préfète de Montpellier, a ainsi porté sa parole. « Célébrer les harkis et les autres membres des formations supplétives, c’est admirer un engagement, honorer un destin et reconnaître une dette. C’est aussi dire que la France ne serait pas tout à fait la même sans les traces laissées par cette histoire qui fut à la fois lumineuse et tragique » en ajoutant : « Ils sont les témoins déchirés d’une époque fracturée par la marche de l’Histoire. Une histoire qui se poursuit par un abandon dont la douleur s’est faite ressentir deux fois sur chacune des rives de la Méditerranée ».
Les femmes de harkis à l’honneur
« Le destin tragique des harkis est une blessure de notre histoire qui nous concerne tous mais il est aussi devenu une part de notre mémoire nationale. Cette communauté de mémoire c’est aussi celle de familles de harkis, ce sont les souvenirs de ces femmes dont certaines furent elles-mêmes combattantes et qui ont suivi leur mari dans cet exil sans aucun espoir de retour ». C’est pourquoi, Patricia Mirallès a souhaité cette année faire de ce jour de commémoration, « l’occasion d’un hommage renouvelé aux femmes de harkis qui dans toute leur famille ont été un pilier souvent peu reconnu. En soutenant leur mari, en permettant à leurs enfants de grandir dans de meilleures conditions, en trouvant quelque chose en elle après le désenchantement, elles ont, elles aussi, écrit l’histoire des harkis ».
Votre région, votre actu !
Recevez chaque jour les infos qui comptent pour vous.
Et de ne pas oublier également les enfants ayant grandi dans des camps comme à Rivesaltes où « en France mais pas tout à fait dans la République, assignés à une vie où même la devise républicaine avait été oubliée » ainsi que les descendants qui « sans avoir fait l’expérience du déracinement où des camps ont reçu l’histoire de leurs parents en héritage. Une histoire difficile et douloureuse mais qui doit être source de fierté ». Une fierté qui passera par une réparation entière même si certains dans la communauté l’estiment trop tardive ou insuffisante compte tenu du sacrifice des harkis désormais, au moins, enfin pleinement, reconnu par la République.
Personnalisez votre actualité en ajoutant vos villes et médias en favori avec Mon Actu.