Le «singe». Il s’agite, s’échine dans les arcanes du marché aux puces au centre de Santiago du Chili, un samedi matin. Alejandro Mono González, 78 ans, converse avec ses collègues des étals voisins, remet en place le cadre d’une sérigraphie ou échange avec les clients de son échoppe, dont beaucoup ignorent qu’il est un peintre muraliste connu dans le monde entier. Rencontrer «Mono» («singe» en espagnol, «un surnom donné à l’école primaire parce que j’étais hyperactif, ça me poursuit encore») est chose aisée : il stationne presque tous les week-ends dans le même hangar qui accueille parfois concerts et happenings divers. Le coincer pour une interview en est une autre. Ce fils d’un ouvrier et d’une travailleuse agricole, membres du PC, issu de Curicó, à 200 bornes au sud de la capitale chilienne, ne se sert de son téléphone que pour poster sur Instagram et répondre aux mails, les années bissextiles.
Finalement, après six tentatives, il emmène dans son atelier, à l’autre bout du marché, joyeux fatras ouvert à toutes les brises. «Plus que les ventes, j’aime la façon dont nous créons ici un public. Pendant que je regarde passer les meubles, il y a un dialogue permanent. Je suis comme un passeur», jure-t-il. Jean maculé, tee-shirt bleu élimé et moustache touffue, il s’assied à côté d’une de ses affiches pour les Jeunesses communistes datant de 1971, qui figuraient l’an dernier dans une expo sur le design latino-américain au