Les sculptures d’André Bloc, créateur multidisciplinaire et visionnaire
L e 8 novembre 1966, à l’âge de 76 ans, André Bloc chute mortellement lors de la visite d’un temple à New Delhi en Inde. Il venait de quitter le Japon et s’apprêtait à poursuivre son périple vers le Népal. Cet accident tragique brisa un parcours singulier ; d’ingénieur à éditeur de presse, d’architecte à sculpteur, André Bloc ne se contenta pas de vivre une seule vie. Et celles qu’il vécut furent à la marge de tout, tant dans son approche pratique que de son vocabulaire formel. Ainsi, à travers l’ingénierie, il s’intéressa à l’architecture, et à travers la lecture assidue de la revue L’Esprit nouveau, il fréquenta au début des années 1920 des figures telles que Le Corbusier, Auguste Perret, Henri Sauvage ou encore Michel Roux-Spitz. La modernité dans son expression la plus libre, loin d’hypothétiques préceptes stylistiques, le fascinait, au point qu’il lui consacra à son tour un magazine. L’Architecture d’Aujourd’hui vit le jour en 1930, et entraîna André Bloc au cœur des cercles de la création, dont il devint l’un des plus fins observateurs.
Une œuvre théâtrale sur les hauteurs de la Seine
À cette époque, il déclarait par le biais de ses éditos : « Nous croyons à l’Unité de la création, qu’il s’agisse d’urbanisme, d’architecture, d’équipement intérieur ou d’art pur. » André Bloc était en effet un homme en perpétuel mouvement, animé par la volonté frénétique de faire tomber les frontières entre les disciplines.Un corps à corps avec l’œuvre. C’est en prenant le large qu’il y parvint réellement, en passant lui-même à la réalisation. Il a alors 70 ans et choisit le cadre de son terrain de Meudon pour mettre en forme son point de vue, à travers son projet de maison, mais aussi par le biais de ses sculptures, qui deviendront ici de monumentaux habitacles. Il mettra ainsi de côté ce fonctionnalisme tant vénéré par ses contemporains pour explorer les dimensions plastiques possibles de l’architecture. Sur les hauteurs de la Seine, avec l’ouest parisien en toile de fond, son œuvre se déroulera en deux temps, comme un amphithéâtre dont la maison occupera la scène, et le jardin les gradins.
EN CONTREBAS SUR LE TERRAIN, LA MAISON qu’André Bloc s’était fait construire à Meudon, aujourd’hui propriété de la galerie Nathalie Seroussi. Au premier plan, on aperçoit une sculpture en bronze d’André Bloc et une autre de Sol Lewitt.© Alexandre Guirkinger