Agnès b.
Jean-François Jonvelle
Moi en 1980 3/7.- Pour les 45 ans de Madame Figaro, sept célébrités plongent dans leurs albums photos et leurs souvenirs. Et nous racontent… Aujourd’hui, la créatrice Agnès b.
«J’ai toujours été d’une nature optimiste, ce qui exaspérait ma mère. Dans les années 1980, j’avais cinq enfants et je travaillais énormément, j’aimais profondément mon métier. Je me souviens de l’ambiance dans la boutique agnès b. que nous avions ouverte rue du Jour, à Paris, avec mon mari, Jean-René de Fleurieu, c’était très joyeux. Nos amis intellos, Félix Guattari, André Glucksmann, qu’on appelait Glucks, avec ses cheveux longs et son blouson en cuir, ou Gilles Deleuze, passaient souvent, on s’installait autour d’une table pour discuter, écouter Bob Marley, coller sur les murs nos affiches de films préférés. En 1980, j’ai 39 ans. Sur cette photo, on peut voir la genèse de mon cardigan pression. Je porte un sweat que j’enfile par la tête et je pense alors à tous ces vêtements aux petits boutons rapprochés que je voyais dans mon enfance à Versailles sur les tableaux comme le Pierrot, de Watteau. Voici comment cette pièce est née. J’ai toujours eu le souci de créer des vêtements utilitaires, intemporels, fabriqués en France. Et cela a tout de suite marché car, je pense, je proposais quelque chose de différent. Les années 1980 ont d’ailleurs marqué un véritable bond pour ma maison. Nous avons ouvert des boutiques à New York, Londres, Amsterdam, Tokyo… Ce sont les journalistes qui ont porté ma marque, car je ne faisais jamais de publicité, très influencée par le courant situationniste de Debord. C’était une époque où l’on s’amusait vraiment. Et puis, le sida est venu jeter son voile sombre. J’ai alors fait installer de gros aquariums dans mes boutiques remplis de préservatifs, dans lesquels tout le monde pouvait piocher, même sans rien acheter.»
Agnès b.
Jean-François Jonvelle