Publié le
28 sept. 2025 à 6h36
« Il y a une période de ma vie où j’allais plus au tribunal qu’à la boulangerie. » Le procès du 6 octobre 2025 n’effraie donc pas Sylvie Monnot, ancienne juriste. Le jour de son 56e anniversaire sera peut-être aussi celui d’une première délivrance : depuis 2021, cette habitante de Parempuyre (Gironde) se bat pour que la CPAM de la Gironde reconnaisse ses droits. Une demande de pension d’invalidité d’autant plus importante qu’elle vit, depuis plus de dix ans, avec une tumeur au cerveau inopérable et de lourdes séquelles motrices.
Pour comprendre le combat de Sylvie Monnot, il faut remonter onze années en arrière. En 2014, lorsqu’on lui diagnostique une tumeur cérébrale. Cela faisait quatre ans déjà qu’elle disait « ne plus se sentir pareil ». « J’avais des maux de tête, des nausées et je cherchais mes mots », se remémore-t-elle. Le résultat de l’IRM est sans équivoque : il s’agit d’une tumeur au cerveau inopérable.
« J’ai subi une radiothérapie en 2015 qui m’a laissé des séquelles motrices », explique-t-elle. Impossibilité d’écrire, tremblements, perte d’équilibre, fatigabilité excessive… Son quotidien est bouleversé mais Sylvie Monnot aime son travail. « Y arriver, c’est une victoire sur ma maladie », livre-t-elle, la voix tremblante.
Son parcours professionnel a été riche. « J’ai travaillé au service contentieux de la MSA (la sécurité sociale agricole) mais j’ai également enseigné le droit, l’économie, la comptabilité et la gestion d’entreprise », se souvient-elle. À la découverte de sa tumeur, l’ancienne juriste travaillait à son compte en tant que formatrice en communication, dans le domaine juridique, auprès des élus et des collectivités. Un métier qui l’amenait à se déplacer, à préparer des cours. Une fonction où les heures sont parfois difficilement calculables.
« Une crise plus violente »
Mai 2021 marque une nouvelle bascule dans sa maladie. « Une crise plus violente » qui a entraîné la perte de l’usage de ses jambes et la perte totale de la parole. Depuis cette date, Sylvie Monnot peut perdre la parole pendant une heure, trois jours comme des semaines. Elle a dû réapprendre à marcher auprès d’un kinésithérapeute et à parler avec le soutien d’une orthophoniste. Son traitement contre ses troubles cognitifs lui est vital, chaque matin une infirmière s’assure qu’elle l’a bien pris.
« Mon métier devient compliqué, explique-t-elle. Mon médecin demande alors une invalidité le 2 novembre 2021. » L’aide qu’elle sollicite pour constituer son dossier lui est refusée. Deux mois plus tard, le 17 janvier, sa demande de pension d’invalidité est rejetée, elle aussi, sans justification, alors même qu’elle est convoquée ce jour-là à une visite médicale. Lors de cet examen, le médecin de la CPAM émet un avis favorable pour une mise en invalidité de catégorie 2, en raison d’une « réduction de capacité de gain par usure prématurée de l’organisme ».
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Ce qui bloque alors son dossier : des documents administratifs transmis par son expert-comptable, notamment un tableau indiquant le nombre d’heures travaillées via sa société. « À sa lecture, ils ont considéré qu’il s’agissait de faux documents. » Pourtant, une attestation sur l’honneur de l’expert-comptable valide un total de plus de 1 500 heures effectuées.
Un long combat
S’ensuivent quatre années de combat et de lenteurs administratives, entre la commission de recours amiables, les courriers au directeur de la CPAM de la Gironde et des décisions contradictoires. « La médiatrice de la CPAM de Bordeaux a rejeté la médiation, explique Sylvie Monnot, précisant que les documents que je fournis ne sont pas de ‘nature’ à lui permettre de ‘proposer une solution visant à reconsidérer la décision initiale’. » Ces échanges ont été consultés par actu Bordeaux.
La CPAM accuse Sylvie Monnot de « faux et usage de faux en vue d’obtenir des prestations sociales ». Pourtant, elle affirme que 98 % de son activité est réalisée avec un seul client : la Caisse des dépôts et consignations, qui a accepté de fournir les preuves nécessaires. À l’appui : factures, feuilles de présence, courriels de prise en charge des formations… « J’ai perdu mon droit aux indemnités journalières et je me suis retrouvée toute l’année 2022 sans aucun revenu », déplore-t-elle.
À bout et malade, elle appelle la Caisse nationale d’Assurance maladie à Paris et les menace
d’une plainte au pénal si elle n’est pas reçue. « Ils obligeront la CPAM de Bordeaux à me recevoir, de nouveaux documents devront être envoyés…et tout cela pour rien. »
« En dehors du défenseur des droits de Paris, personne n’a pris le temps de m’écouter. »
Sylvie Monnot
ancienne juriste
Sylvie Monnot explique que sa santé s’aggrave de manière irréversible et que, faute de moyens n’étant plus prise en charge à 100 %, elle a dû, en 2022, annuler deux hospitalisations d’un mois chacune. Le premier traitement était un protocole pour son cerveau, le deuxième en vue de prévenir son diabète. En vain. Elle souffre désormais de nouvelles séquelles au cerveau, de diabète, stress chronique et d’une parodontologie dentaire sévère qui a entraîné une greffe de la gencive.
« Je ne pourrai pas récupérer ces années de ma vie. Je ne saurai jamais si le traitement du neurologue aurait pu marcher mais je veux que ça se termine. Ils me font vivre l’enfer, cela fait quatre ans que j’attends que l’on respecte mes droits. »
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