C’est l’histoire d’une jeune fille de 13 ans qui rêve d’un futur où elle serait médecin, en Ukraine ou ailleurs. Une réfugiée qui a connu l’exode, la séparation avec son père après avoir dû quitter son pays avec sa mère et sa sœur pour venir s’installer à l’autre bout du continent européen, en Bretagne. Une collégienne, excellente élève, capable de parler cinq langues (ukrainien, russe, allemand, anglais et français) et désormais jeune sapeur-pompier à Lamballe.

La vie de Kira Grebenik a basculé en février 2022. La guerre venait d’éclater en Ukraine et dans sa capitale Kiev. En moins d’une journée, il a fallu rassembler toutes ses affaires et faire ses valises. Quand elle raconte ce départ dans un français impeccable, la voix de Kira ne se trouble pas et son regard ne s’embue pas davantage derrière ses fines lunettes cerclées. « Nous avions très peur, je me souviens d’arriver avec mes grands-parents dans une gare où il y avait énormément de monde. Les enfants étaient poussés dans les trains. Nous nous tenions par la main. »

Kira Grebenik fait partie des 26 jeunes sapeurs-pompiers lamballais, encadrés par quatorze formateurs. Tous les samedis matin, ils se retrouvent pour trois heures de formation et une heure de sport.Kira Grebenik fait partie des 26 jeunes sapeurs-pompiers lamballais, encadrés par quatorze formateurs. Tous les samedis matin, ils se retrouvent pour trois heures de formation et une heure de sport. (Julien Vaillant)« Le plus dur, c’est la peur de perdre des gens qui me sont chers »

Il y a eu ensuite le voyage vers la Pologne en bus, avec sa mère et sa sœur, depuis Kiev. Sur la route, Kira voit des cars renversés et brûlés, un hôpital éventré. Le périple s’achèvera en France, où le trio s’est installé grâce à des amis ukrainiens de son père, militaire de carrière resté au front. À Lamballe d’abord, puis à Créhen, Pluduno et, désormais, à Hénanbihen. « J’ai beaucoup changé d’école », sourit Kira qui a des nouvelles de son pays natal tous les jours grâce à sa grand-mère. « Le plus dur, c’est la peur de perdre des gens qui me sont chers », livre Kira

Nous avions très peur, je me souviens d’arriver avec mes grands-parents dans une gare où il y avait énormément de monde. Les enfants étaient poussés dans les trains. Nous nous tenions par la main.

Trois ans et demi après son départ précipité, la jeune collégienne polyglotte semble s’être bien acclimatée à son pays d’accueil. Depuis deux semaines, elle revêt même la tenue des jeunes sapeurs-pompiers, tous les samedis matin, aux côtés de 25 autres enfants.

« J’aime la cohésion d’équipe, le fait de ne pas laisser tomber les autres. C’est une grande force de ne pas être seule », expose Kira pour expliquer son engagement chez les JSP.« J’aime la cohésion d’équipe, le fait de ne pas laisser tomber les autres. C’est une grande force de ne pas être seule », expose Kira pour expliquer son engagement chez les JSP. (Julien Vaillant)Des tests réussis « haut la main »

Une arrivée qu’elle ne doit qu’à elle-même selon l’adjudant-chef Mickaël Lamé, qui assure bénévolement la formation de ces cohortes de futurs pompiers volontaires, depuis 20 ans. « Nous n’avons pas pris Kira avec nous parce qu’elle est ukrainienne et qu’elle vient d’un pays en guerre. Elle a passé les tests (sport, écrit et entretien) comme tout le monde et elle les a réussis haut la main ». « C’est la seule à avoir fait un 20/20 en mathématiques », ajoute, admiratif, Albert Régereau, le plus ancien des quatorze formateurs lamballais des JSP.

Pourquoi Kira a-t-elle décidé de s’engager chez les JSP ? « J’ai envie d’aider les autres et je sais que ça me servira plus tard. Ça a du sens. Et ça me pousse à prendre mes responsabilités, à être ordonné et carré. » Et la jeune fille d’ajouter : « J’aime la cohésion d’équipe, le fait de ne pas laisser tomber les autres. C’est une grande force de ne pas être seule. »