Hier, la Roumanie. Aujourd’hui, la Moldavie. Et demain ? Sous contrôle judiciaire avec interdiction de quitter la France – sauf pour se rendre à Dubaï où il résidait – Pavel Durov voyage autrement. Le fondateur de la plateforme Telegram, arrêté à l’aéroport du Bourget près de Paris l’été dernier et mis en examen pour 17 infractions parmi lesquelles de l’escroquerie ou du blanchiment, s’intéresse de près aux diverses élections qui ont lieu sur le continent européen. Avec une idée en tête : y dénoncer une supposée ingérence française.

Dimanche, lors du scrutin législatif moldave, comme il y a quelques mois pour l’élection présidentielle Roumaine, Durov a utilisé son arrestation et évoqué des pressions de la part d’agents du renseignement français. Ces derniers lui auraient demandé de « censurer » des chaînes et publications Telegram qui ne leur plaisent pas. Dans le cas de la Moldavie, d’ailleurs, en échange de faveurs judiciaires. Quelques lignes sans une once de preuve qui retournent habilement les soupçons d’ingérences envers la Russie, son pays de naissance. Quand bien même ceux-ci sont avérés. Au Royaume-Uni, la BBC a notamment infiltré un réseau de recrutement, destiné à créer de la désinformation pro-russe sur les réseaux sociaux moldaves. Le tout organisé depuis… Telegram.

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Pavel Durov cultive une rancœur contre la France. Se placer dans la peau d’une victime d’une machination visant à l’exploiter, lui et son réseau, est en soi une stratégie. Celle-ci permet également de faire oublier sa bonne collaboration avec les autorités lors de son arrestation. Non pour satisfaire à des demandes politiques, mais plutôt pour des retraits de contenus liés à de la pédocriminalité. Des informations qui écornent toutefois l’image de Telegram comme plateforme « antisystème ».

Mais la nouveauté est l’audience dont Pavel Durov dispose désormais. Une dizaine de millions d’abonnés sur son canal Telegram, d’où il pousse ses propres publications en notification mobile. Et plus de 2,5 millions de liseurs sur X, où il reçoit aujourd’hui le soutien d’un certain Elon Musk, le tenancier des lieux, également très intéressé par la politique européenne. Grâce à cette alliance de circonstance, la visibilité des messages de Durov explose à plusieurs dizaines de millions de vues. La riposte du Quai d’Orsay contre la désinformation, en plein renouveau, est totalement sous l’eau. Un compte X tout frais, « French Response« , rétorque officiellement à chaque message pour démentir les propos de Durov. Des contre-attaques qui ne reçoivent que quelques dizaines de milliers de vues pour les plus consultées. La définition même de l’impuissance.