Le bilan humain de la contestation à Madagascar est terrible. Selon l’ONU, au moins 22 personnes ont été tuées depuis le début jeudi des manifestations ayant embrasé le pays.

Il y a également « plus d’une centaine » de blessés, a affirmé le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme dans un communiqué diffusé lundi. « Parmi les victimes figurent des manifestants et des passants tués par des membres des forces de sécurité, mais aussi d’autres tués lors des violences et des pillages généralisés qui ont suivi, perpétrés par des individus et des gangs sans lien avec les manifestants », poursuit le texte du Haut-Commissaire, Volker Türk, qui se dit « choqué » par la « réponse violente des forces de sécurité ».

Un mouvement baptisé Gen Z

Mobilisés depuis jeudi, des milliers de protestataires sollicités via les réseaux sociaux à travers un mouvement baptisé Gen Z, sont descendus lundi dans les rues de la capitale Antananarivo. Les revendications y dépassent désormais le ras-le-bol initial qui s’exprimait contre les coupures incessantes d’eau et d’électricité.

Contesté personnellement, le président Andry Rajoelina a annoncé lors d’une allocution solennelle lundi soir « mettre fin aux fonctions » de son gouvernement, y compris de l’indéboulonnable Christian Ntsay, Premier ministre depuis 2018, quand il avait été nommé par le précédent président.

Plus nombreux que lors du dernier rassemblement samedi et pour beaucoup vêtus de noir, les manifestants, partis de l’université d’Antananarivo, ont scandé lundi des chants appelant à la démission du président. Ancien maire d’Antananarivo, Andry Rajoelina, 51 ans, s’était installé une première fois au pouvoir de 2009 à 2014 à la faveur d’un coup d’Etat faisant suite à un soulèvement populaire. Il s’est ensuite fait élire en 2018 puis réélire en 2023 lors d’un scrutin contesté. Un des mots d’ordre affichés par la Gen Z via ses canaux est « Rajoelina, dégage ».

Une « force non-nécessaire », fustige l’ONU

« A peine sommes nous sortis dans la rue que les forces de l’ordre ont décidé de nous tirer dessus », a accusé un porte-parole de la Gen Z pour expliquer ce durcissement du positionnement du mouvement. Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a mis en cause la « force non-nécessaire » avec laquelle les forces de sécurité sont intervenues en relevant que « certains officiers ont également utilisé des balles réelles ». « Aucun chiffre officiel ne corrobore ce bilan », a pour sa part démenti le ministère des Affaires étrangères malgache à propos des 22 morts.

Notre dossier sur Madagascar

Le mouvement Gen Z reprend à son compte le drapeau pirate tiré du manga One Piece, signe de ralliement vu en Indonésie ou au Népal de mouvements de contestation. Il s’est baptisé en référence à la génération des personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010. Et plusieurs protestataires affichaient lundi des pancartes « On veut vivre, pas survivre », un slogan devenu emblématique du mouvement.