Les stars campent deux célibataires esseulés embarquant dans un périple fantasmagorique à travers leurs souvenirs. Un merveilleux livre d’images qui tourne hélas à vide.
Confier à Margot Robbie et Colin Farrell le volant d’une fable romantique fantasmagorique avait de quoi faire saliver sur le papier. C’est le point de départ du poétique, mais au final, poussif road trip A Big Bold Beautiful Journey du réalisateur indépendant coréo-américain Kogonada, qui arrive ce mercredi dans nos salles. Les stars de Barbie et des Banshees d’Inisherin campent Sarah et David. Ces deux célibataires esseulés, meurtris par les déceptions amoureuses et la peur de l’engagement, se rencontrent à un mariage.
Le GPS entremetteur
Elle lui propose de danser et lui demande, en plaisantant, sa main en mariage. Il décline. Puis dès le lendemain regrette. Heureusement, entre en scène un entremetteur inattendu : le GPS de la voiture de David. Petit engin rétro et autoritaire qui pousse David à s’arrêter dans un fast-food, où le véhicule de Sarah est tombé en panne. La providence fait bien les choses. Voici les compères embarqués dans un covoiturage. Direction «une merveilleux et fabuleuse aventureuse», promet (à tort) le GPS, qui fait basculer le duo et le spectateur dans une odyssée surréaliste. À mi-chemin, entre Eternal Of The Spotless Mind de Michel Gondry pour le plongeon dans des souvenirs douloureux et Les parapluies de Cherbourg de Jacques Demy pour l’esthétique.
Chaque étape de ce périple est marquée par une porte plantée en pleine nature. Une fois ouverte, David et Sarah se retrouvent propulsés dans un événement passé, qui les a marqués au fer rouge, et qu’ils vont revivre ensemble. Au choix, un spectacle humiliant de fin d’année, la mort d’un parent, le jour de leur naissance, un dîner de rupture ou un simple week-end au bord de mer.
Chaque vignette a son atmosphère propre (comédie musicale, mélo, seul en scène) et est d’une beauté indéniable. Le hic c’est que mises bout à bout, elles forment un joli livre d’images artificielles où peine à percer l’émotion. Margot Robbie et Colin Farrell ont un charisme et une alchimie indéniables. Créatrice de Fleabag, Phoebe Waller-Bridge et Kevin Kline amusent en loueurs de voitures débordant d’interrogations existentialistes, que l’on croirait sortir d’une pièce de Beckett. Mais tout cela ne suffit pas pour insuffler un souffle, une cohérence à ce voyage intérieur, où on s’ennuie ferme et dont l’issue romantique ne fait guère de doute.
Quel dommage d’avoir une telle distribution et de ne pas arriver à livrer un classique ! Le box-office américain illustre cette déconvenue : seulement 5 millions de recettes alors que le budget de cette fable s’élève à 45 millions de dollars.