«Je reconnais mes faits qui me sont reprochés (sic)», «je suis le petit raté de la famille», «je suis un zonard depuis mineur». Les prévenus, souvent très jeunes, que l’on voit défiler devant les juges dans le tribunal de Marseille et que le duo Alice Odiot et Jean-Robert Viallet ont convaincus de se laisser filmer dans ces moments fatidiques pour eux d’une comparution immédiate, dont l’issue est souvent la prison, sont souvent aussi désarmants que désarmés. Stups documente le fléau de la délinquance lié au trafic de stupéfiant à travers ces petites mains qui troquent un boulot de manutentionnaire ou de serveuse non déclarée contre un job de guetteur ou de réceptionniste de colis délictueux, pour de l’argent facile.
Une juge demande à l’un d’eux, récidiviste de 17 ans, s’il a fait le calcul entre ce que le trafic lui rapporte et le temps passé en prison : «salaire d’esclave». Les magistrats paraissent souvent dépassés par le rapport mal adapté des sanctions prévues par la loi et des trajectoires d’individus en dérive sociale, voire montrant les premiers signes d’une pathologie psychiatrique. On ne sort jamais ici des murs angoissant du tribunal, avec ses bruits de portes et de clefs, mais ce qui transpire à chaque séquence, c’est le délitement à l’extérieur du suivi social, des moyens de l’école et de l’hôpital, le résultat du discrédit par les politiques répressives aussi bien de la police de proximité que d’un précieux tissu associatif. La sévérité qui s’applique ici sur tous les cas filmés contrevient, à tout le moins, au prétendu laxisme dont les juges feraient preuve, même si le «rappel du cadre de la loi» et la mise au placard, toujours stupéfiante à entendre et voir, laisse le sentiment d’aggraver les premiers signes d’une perdition qu’il faudrait savoir stopper net.