Faute de financement de l’État français, les Nightjet cesseront de circuler le 14 décembre. Les passagers qui l’ont emprunté sont partagés entre la nostalgie d’une bonne expérience et l’étonnement d’un arrêt aussi soudain du train de nuit.

Le 14 décembre 2025, les Nightjet Paris-Vienne et Paris-Berlin s’élanceront de la gare de l’Est pour la dernière fois. En pleine rigueur budgétaire, l’État ne renouvellera pas en 2026 sa subvention de 10 millions d’euros accordée ces dernières années à ces lignes. La mobilisation en gare de Paris-Est le 26 septembre organisée par le collectif Oui au train de nuit et la pétition en ligne qui réunit 52.000 signatures n’y auront rien changé : lancés en 2021 et en 2023, ces lignes seront définitivement supprimées, privant ainsi la France de ses seules liaisons de nuit internationales.

Un arrêt brutal qui provoque l’incompréhension et la déception chez les adeptes du train, mais aussi d’agréables souvenirs. Pour se rendre à Vienne en octobre 2024, Ambre, 26 ans, a opté sans hésitation pour le Nightjet : «Je refusais de prendre l’avion pour des raisons écologiques et, en même temps, je n’avais jamais voyagé en train de nuit. Je voulais tester l’expérience. À ma surprise, j’étais toute seule dans le compartiment tout le long du parcours.» Une privatisation impromptue qui lui assure une grande tranquillité pendant les 15 heures de trajet, pour lequel elle a déboursé 80 €. Ce qu’elle a particulièrement apprécié ? Le petit déjeuner inclus et la possibilité de choisir un compartiment réservé aux femmes.


Passer la publicité

Une alternative de moins à l’avion

Karina se souvient quant à elle de ses trajets dans l’ancien Paris-Berlin, arrêté en 2011 par la Deutsche Bahn avant d’être ressuscité en 2023 par les chemins de fer autrichiens (ÖBB). «J’étais une grande adepte de ce train, que je prenais lorsque j’étudiais en Allemagne  il y a une quinzaine d’années. J’étais extrêmement heureuse de son retour, alors sa suppression précoce me déçoit et m’inquiète. Même des lignes plutôt populaires peuvent être rayées de la carte en quelques semaines seulement. Dans un contexte de réchauffement climatique, quelles alternatives avons-nous encore ?»

Si la plupart des passagers vantent le faible impact écologique du rail, d’autres ont opté pour le train plutôt pour l’expérience de voyage. «J’ai pris le Paris-Vienne en amoureux il y a quelques années. C’était une superbe expérience, que je referais sans hésiter, malgré le coût un peu élevé pour notre budget, se souvient Jean, la trentaine. Je suis attristé d’apprendre son arrêt. J’en faisais souvent la promotion auprès de mes amis qui souhaitent voyager sans prendre l’avion. Je comptais prendre un jour le Paris-Berlin, mais c’est compromis.» Sa seule déception : un agent de bord pas des plus agréables.

Au-delà de la dimension écologique, c’est la cohésion européenne qui en prend un coup

Laure Jacquet, directrice de l’agence de voyages Discovery Trains

Fin des liaisons de nuit, davantage de liaisons de jour

Valentin devra aussi abandonner son projet d’emprunter le Nightjet Paris-Berlin après une expérience satisfaisante dans le Vienne-Paris. «J’avais pris ce train pour rentrer de mes vacances en Slovénie  en 2023. En train de nuit, on vit une expérience de voyage que l’on ne retrouve pas en avion. C’est plus confortable et parfois pratique sur de longues distances.»

Au-delà des passagers, l’annonce de la fermeture des lignes a provoqué des réactions auprès des professionnels du tourisme. Pour Laure Jacquet, directrice de l’agence Discovery Trains, l’arrêt des circulations isole un peu plus la France de ses voisins européens : «C’était un lien européen fort entre les peuples. Aller par le rail en une nuit à Vienne ou Berlin donnait le sentiment d’être proches. Au-delà de la dimension écologique, c’est la cohésion européenne qui en prend un coup.»

Bientôt privés de liaisons de nuit vers l’Allemagne et l’Autriche, les voyageurs devront opter pour des trajets de jour, amenés à se renforcer dans les prochaines années. «Le Nightjet Paris-Berlin est fortement concurrencé par le nouvel ICE Paris – Berlin  qui effectue le trajet en 7 heures 30 et dont la fréquence devrait augmenter en 2027. D’ici à deux ans, l’offre grande vitesse de jour va fortement augmenter entre Paris, Vienne (avec changement à Munich ) et Berlin», analyse Luc Levert, journaliste à La Vie du Rail et Rail Passion. Un mal pour un bien ?


Passer la publicité

EN VIDÉO – Pourquoi la SNCF va changer la numérotation des sièges à bord de ses trains ?