• Prêté par le Met de New York, le portrait de « Madame X » est exposé au musée d’Orsay à Paris jusqu’en janvier.
  • Peint dans la capitale française en 1884 par l’artiste américain John Sargent, ce tableau surnommé la « Joconde américaine » avait fait scandale à l’époque.
  • Le JT de TF1 nous conte sa fabuleuse histoire.

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Le 20H

Avec son port altier et sa nonchalance gracieuse, il est difficile de résister à « Madame X ». Cette beauté tout droit sortie des salons parisiens de la Troisième République a été peinte en 1884 par le peintre américain John Singer Sargent. « Elle poudrait tout son corps, apparemment, elle soulignait ses veines également avec du fard bleu. Elle mettait même du rouge à lèvres sur ses oreilles pour faire ressortir la blancheur de sa peau », détaille Caroline Corbeau-Parsons, co-commissaire de l’exposition « Sargent : éblouir Paris », dans le reportage ci-dessus. 

Ce qu’on ne voit plus, c’est qu’au moment où le tableau est présenté, une bretelle est baissée sur l’épaule de ‘Madame X’.

Stéphanie Herdrich, conservatrice des peintures au Metropolitan Museum of Art de New York

« Une Joconde », s’exclament aujourd’hui les Américains, dont certains fans vont jusqu’à se tatouer l’image sur la peau, oubliant qu’elle a d’abord été une pestiférée, au cœur d’un scandale, affublée d’un nom énigmatique. Stéphanie Herdrich, conservatrice des peintures au Metropolitan Museum of Art de New York (Met) présente dans le JT de TF1 son vrai visage et son nom : Virginie Gautreau, une toute jeune Américaine mariée à un industriel français. « Après son mariage, elle va se métamorphoser complètement avec un nouveau look très particulier, ultra-glamour. Elle cherchait vraiment la gloire à Paris. Récemment, on l’a comparée aux filles Kardashian », explique-t-elle.

Une figure incontournable qui fascine le peintre prometteur qu’est alors Sargent. Il la supplie de poser pour lui. « Il cherche d’abord sous quel angle la représenter. On voit qu’il essaie vraiment de saisir cette grâce », poursuit la conservatrice. Il lui faudra un an de travail pour trouver le bon profil. Le peintre est sûr de lui, il détient un chef-d’œuvre. Encore plus fort que tous les portraits réalisés jusqu’ici et qui lui valent déjà un parcours sans faute. Mais au salon de 1884, tout s’enraye. « Ce qu’on ne voit plus, c’est qu’au moment où le tableau est présenté, une bretelle est baissée sur l’épaule de ‘Madame X' », précise-t-elle. 

Une bretelle pour basculer dans le déshonneur et dont il ne reste qu’un témoignage sur une photo, comme on peut le voir ci-dessous. « On voit très bien l’effet que cela donnait avec notamment la bretelle qui presque enserre la chair du bras et qui donne un côté encore plus sensuel finalement à l’œuvre », souligne Paul Perrin, co-commissaire de l’exposition.

TF1TF1Sargent s’exile à Londres

On hurle alors à l’indécence. Comment a-t-on osé représenter une femme mariée avec une robe prête à tomber et un décolleté sans corsage ? Les caricaturistes s’en donnent à cœur joie. Résultat, le modèle et son peintre sont bannis des salons. Sargent s’exile à Londres, mais garde toujours son tableau bien en vue dans son atelier, même si pour masquer l’identité du modèle, il rebaptise son tableau « Madame X ». « Tous les visiteurs, tous les gens qui vont venir poser pour lui, tous les gens qui viennent rendre visite à Sargent voient ce tableau qui est en majesté dans son atelier. Donc, il en est quand même fier, il ne le cache pas derrière un rideau. Mais il a repeint la bretelle », explique Paul Perrin. Une bretelle droite repeinte à l’évidence un peu plus vite que la première, mais sans explication ni justification. Et c’est sous cette forme que « Madame X » va connaître la gloire, en majesté depuis cent ans au mur du Met, le plus grand musée américain.

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Ironie de l’histoire ? Une autre Madame Gautreau, alias « Madame X » est accrochée au musée d’Orsay, après avoir été restaurée. Car quelques années après l’affaire, elle alla jusqu’à commander au peintre français Gustave Courtois un nouveau portrait… La bretelle à nouveau négligemment tombante sur son épaule.

La rédaction de TF1info | Reportage : Florence LEENKNEGT et Jean-François DROUILLET