Entre les conséquences directes et indirectes de la guerre en Ukraine, une population vieillissante et un taux de natalité au plus bas depuis 25 ans, la Russie est confrontée à une importante crise démographique. Meduza, le plus grand média indépendant russophone, a fait l’inventaire des propositions les plus invraisemblables des responsables russes pour enrayer cette chute de la natalité. Si certaines propositions prêtent à sourire, d’autres sont à la fois ridicules et inquiétantes.
Des propositions inattendues
En juin 2024, le porte-parole du président Vladimir Poutine, Dmitri Peskov, a qualifié le faible taux de natalité du pays de « catastrophique ». La relance démographique est aujourd’hui l’une des « priorités absolues » du gouvernement russe et Vladimir Poutine a annoncé un nouvel objectif de fécondité pour le pays : 1,6 enfant par femme en 2030 et 1,8 en 2036. Pour y parvenir, la Russie a notamment limité l’accès à l’avortement, interdit la promotion d’un « mode de vie sans enfant » mais aussi interdit la « propagande homosexuelle ».
Valéri Golovtchenko, député à la Douma de la ville de Moscou, a proposé d’offrir aux parents des bons d’achat pour les cafés et les places de théâtre lorsqu’ils envoient leurs enfants en sorties scolaires. Quant à Natalia Agre, fonctionnaire du ministère de l’Éducation, elle estime que le rétablissement des discothèques scolaires pourrait inciter les couples à avoir plus d’enfants. Peut-être qu’une loterie nationale visant à offrir des appartements, des voitures et des appareils électroménagers aux jeunes parents serait également de nature à encourager la natalité ? C’est en tout cas l’espoir de Boris Tchernychov, vice-président de la Douma d’État, qui n’a pas hésité à formuler très sérieusement cette proposition.
Des propositions qui visent en particulier les femmes
Sans surprise, un grand nombre des propositions du gouvernement russe concerne les femmes. Ainsi Sultan Khamzaïev, député à la Douma, souhaite que les femmes qui renoncent à l’avortement pour confier leur enfant à l’État soient indemnisées. Natalia Poluyanova, députée à la Douma, milite pour une meilleure protection des femmes contre les horaires de travail irréguliers et les heures supplémentaires, et Tatiana Boutskaïa, députée à la Douma d’État, souhaite imposer des quotas aux employeurs concernant le nombre d’enfants que leurs employées doivent avoir.
Mais les étudiantes sont particulièrement ciblées, avec de très nombreuses propositions les concernant : indemnisation de 100 000 roubles (1 200 dollars) par étudiante enceinte, augmentation des points aux scores d’aptitude à l’université pour les étudiantes qui accouchent dans l’année suivant leur candidature, gratuité des frais de scolarité universitaires aux étudiantes qui accouchent. Margarita Pavlova, membre du Conseil de la Fédération, souhaite quant à elle que soit supprimée l’incitation à l’université pour les filles.
Moins d’alcool, plus d’enfants
Il est difficile de prendre certaines propositions au sérieux, tant elles semblent en décalage avec les raisons qui poussent un couple à avoir des enfants…ou à décider de ne pas en avoir. Anatoli Chirikov, membre du Conseil de la Fédération, veut par exemple limiter le nombre d’appartements d’une chambre sur le marché. Dmitri Goussev, député à la Douma, veut obliger les publicitaires à ne montrer que des familles de trois enfants ou plus. Quant à Andreï Svintsov, député à la Douma, il milite pour l’interdiction de la vente d’alcool le dimanche. Une proposition qui a le mérite de s’attaquer à un véritable problème de santé public, l’alcoolisme, toujours responsable d’une surmortalité inquiétante chez les hommes russes.