Partager la production des semi-conducteurs entre Taïwan et les États-Unis, jusqu’à un équilibre de 50-50 ? C’est une perspective que Taipei n’approuve absolument pas. Et qui n’aurait même pas été discutée.
Au moins, les choses sont dites. Interrogée le 1er octobre 2025 à son retour des États-Unis, la vice-première ministre taïwanaise Cheng Li-chun a été très claire : il n’y aura pas de partage de la production des semi-conducteurs entre l’île et l’Amérique. En tout cas, pas dans les proportions évoquées ces jours-ci par Washington.
Le 27 septembre, le secrétaire au commerce américain Howard Lutnick s’est pourtant avancé sur un tel scénario à l’antenne de la chaîne NewsNation. À l’entendre, il aurait indiqué à Taïwan qu’il serait « essentiel » que l’Amérique récupère la moitié de la production des puces. En clair, 50 % pour Taïwan et 50 % pour les États-Unis.
50 % pour Taïwan, 50 % pour les USA ? Personne n’a parlé de ça
Cette perspective s’avère, à entendre Cheng Li-chun, farfelue. En tout cas, la vice-première ministre est catégorique : sa délégation n’a absolument pas abordé ce sujet lors de son passage en Amérique. Les discussions traitaient plutôt de la réduction des droits de douane et de mesures visant à faciliter les exportations taïwanaises vers les USA.
Le gouvernement taïwanais a validé les propos de la vice première ministre : il n’est pas question que Taïwan suive une telle voie, estimant que cela va « à l’encontre de la coopération entre Taïwan et les États-Unis ». Une levée de boucliers également observée au sein des partis politiques locaux, qui ont affiché une unanimité notable contre ce projet.
L’idée de ce partage survient dans un contexte où Taïwan subit la politique douanière de Donald Trump, avec une taxation à hauteur de 20 %, selon un document établi fin juillet. En comparaison, le Royaume-Uni se situe à 10 % et l’Union européenne est à 15 %. Quelques pays franchissent même le seuil des 40 % de droits de douane.
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L’influence stratégique mondiale de TSMC, fleuron taïwanais des puces
Taïwan, grâce notamment à TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Company), est devenu l’un des carrefours de la tech moderne. Preuve est : bon nombre de géants du secteur (Nvidia, AMD, Apple, ARM, MediaTek, Qualcomm, Broadcom…) passent par ses usines pour s’équiper, faute d’avoir leurs propres lignes de production.
TSMC figure par les trois grands fleurons mondiaux, avec Intel et Samsung, pour la production de semi-conducteurs, en particulier dans les puces les plus avancées. La majorité des usines (18 au total) sont basées à Taïwan, mais quelques unités de production existent aussi en Chine (2), aux États-Unis (2) et au Japon (1).
Selon une analyse de la Maison Blanche de 2021, TSMC représentait à elle seule 53 % du marché mondial de la fonderie de semi-conducteurs, notait Le Grand Continent. Un rapport du Boston Consulting Group de 2019 avait aussi pointé que 92 % des puces les plus avancées venaient de ses lignes de production, à l’époque.
À la suite du retour de Donald Trump aux USA, TSMC a fait savoir, au début du mois de mars, son intention d’augmenter ses investissements de 100 milliards de dollars dans la fabrication de semi-conducteurs de pointe aux États-Unis. Cela, en complément des 65 milliards de dollars déjà prévus pour une usine basée à Phoenix (Arizona).
Le deuxième mandat de Donald Trump à la présidence des États-Unis est marqué entre autres par une politique orientée pro-business et de volonté de réindustrialisation du pays. Une stratégie qui compte notamment sur les investissements étrangers, en brandissant la menace des droits de douane. Mais cela ne se fait pas sans heurts.
Un risque d’affaiblissement du « bouclier de silicium » ?
Au-delà des enjeux industriels, d’emploi et de partage de la valeur, la réticence manifeste de Taipei à l’idée de trop déplacer sa production l’étranger, ou de la partager avec d’autres, puise aussi dans des considérations plus géopolitiques. En effet, le pays a construit une partie de sa défense face à l’invasion chinoise par le concept de « bouclier de silicium », en référence au matériau de base constituant ces puces.
Pour Taïwan, l’une des manières d’éloigner le risque d’une invasion de Pékin sur l’île (l’Empire du Milieu ne reconnaît pas l’indépendance de son petit voisin et cherche depuis des décennies à le ramener définitivement dans son giron) est de devenir un acteur incontournable de la tech internationale, y compris pour la Chine.
L’analyse de Taipei est de faire en sorte qu’une tentative d’invasion ou de guerre aurait des répercussions terribles sur la production de puces, et donc par conséquent des effets désastreux à l’échelle mondiale. En effet, les semi-conducteurs sont présents dans toute l’économie, des avions aux voitures en passant par l’électroménager, la médecine ou le loisir.
C’est pour cela, d’ailleurs, que le monde a tendance à retenir son souffle à chaque fois qu’un séisme un peu trop puissant vient secouer la région. En 2024, un tremblement de terre d’une magnitude de 7,2 à 7,5 s’était produit juste à l’est de l’île, laissant craindre des effets sur l’approvisionnement en semi-conducteurs.
Quand Taïwan tremble, c’est toute la planète qui peut se mettre à vaciller.
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