« Ça pique un peu… » La mâchoire encore serrée, Stéphane Ravier est sonné par les mots qu’il vient de prononcer en exclusivité sur le plateau de l’émission « Marseille politiques ». « J’ai décidé de ne pas être candidat aux municipales », a annoncé le sénateur (ex-RN, ex-Reconquête), interrogé par le directeur de la rédaction de La Provence Olivier Biscaye et la journaliste de BFM Marseille-Provence Sophie Hébrard.
Le sénateur d’extrême droite met fin à un suspense savamment entretenu. Au début de l’été, il avait de nouveau tendu la main au RN dans les colonnes de La Provence. L’élu a hésité quasiment jusqu’à la dernière minute à l’idée de se lancer ou non dans la course à la mairie de Marseille. La veille, l’idée d’une déclaration de candidature bruissait encore. « Les 48 dernières heures ont été très compliquées », souffle-t-on dans son entourage. Finalement, la pièce est retombée face retrait et le « soutien sans réserve à Franck Allisio », le candidat RN.
« Un tournant de la campagne » pour Franck Allisio
Stéphane Ravier, le 2 octobre 2025, sur le plateau de Marseille politiques à Marseille. / PHOTO NICOLAS VALLAURI
Pour la première fois depuis 1995, après avoir échoué trois fois à conquérir l’hôtel de ville (en 2008, 2014 et 2020), le nom de l’ancien employé de France Télécom ne figurera donc sur aucune liste. Pas même dans les 13e-14e dont il fut maire de 2014 à 2017. « C’était le prix à payer », grince-t-il après l’émission. La note a été envoyée par Marine Le Pen, qu’il avait vilipendé en ralliant Éric Zemmour à la présidentielle de 2022 et qui n’a visiblement jamais pardonné ce départ fracassant.
« On m’a demandé de ne pas être candidat parce que mon ralliement à Éric Zemmour est une plaie qui ne s’est pas refermée, a reconnu Stéphane Ravier. Je quitte en étant extrêmement blessé mais c’est pour l’intérêt supérieur de Marseille. » Franck Allisio, proche de l’ancienne présidente du RN, redoutait aussi les dérapages de ce « jean-mariste » invétéré. Le député de Vitrolles pousse finalement un ouf de soulagement, après avoir découvert l’annonce de son ancien rival en direct sur BFM, en début de soirée. « On échangeait régulièrement. Jusqu’au bout, Stéphane était libre de se présenter, d’attendre ou de faire ce qu’il a fait aujourd’hui (hier), confie-t-il. C’est un tournant important de la campagne. Il a fait quelque chose de rare en politique: faire passer Marseille avant sa personne. » « C’est un sacrifice qui va payer pour battre Benoît Payan et remettre Marseille en ordre », avertit-il.
« 17 % et 19 %, au final, ça fait zéro »
Stéphane Ravier dresse un tableau sombre de Marseille : « Hyperfiscalité délirante », « narcotrafic galopant », théorie complotiste du « grand remplacement »… « Mon seul souci, c’est Marseille et son peuple historique », poursuit-il dans une périphrase excluant bon nombre de Marseillais issus de l’immigration récente. À entendre Stéphane Ravier, ce soutien résulterait d’une logique mathématique : « Les sondages me créditent de 10 % à 17 % d’intentions de vote, Franck Allisio de 15 % à 19 %. Mais 17 et 19, au final, ça fait zéro. Et vous vous interdisez la victoire qui est pourtant à portée de main. »
« Je ne serai pas le diviseur alors que la droite s’est alliée avec la macronie« , promet-il en référence au soutien apporté la veille par Renaissance à Martine Vassal. Mais il se reconnaît « un seul adversaire, la gauche, et un seul ennemi, La France insoumise » imaginant une hypothétique « alliance entre Benoît Payan et Sébastien Delogu ».
Stéphane Ravier a annoncé qu’il ne serait pas candidat à la mairie de Marseille sur le plateau de BFM Marseille Provence et La Provence, ce jeudi 2 octobre 2025. /photo Nicolas VALLAURI
Cet effacement du sénateur d’extrême droite enlève une épine du pied de Franck Allisio qui craignait qu’en coulisses, la droite vassaliste ne pousse Stéphane Ravier à se présenter pour affaiblir son score au 1er tour. « Mes collègues chez LR seront peut-être déçus que je ne serve pas leurs intérêts électoraux », commente Stéphane Ravier.
Ses hésitations de dernière minute ont-elles un lien avec des négociations en vue des sénatoriales de septembre 2026, où il remettra son mandat en jeu ? « On n’a eu aucune discussion, encore moins sur la composition des listes », certifie-t-il. S’il promet qu’il n’y a eu « aucun marchandage », Franck Allisio n’écarte pas l’idée d’intégrer des fidèles de l’ancien maire des 13e-14e sur sa liste: « On va travailler ensemble et échanger sur la constitution des listes, entre autres. Je consulterai évidemment le sénateur et c’est dans la logique qu’il me présente des personnalités qui peuvent apporter quelque chose. »
Contrairement à Lionel Royer-Perreaut (Renaissance), Stéphane Ravier n’annonce pas son retrait de la vie politique. Elle risque toutefois d’être rythmée par ses rendez-vous judiciaires : il attend le procès en appel de l’affaire de l’emploi octroyé par la Ville sous Jean-Claude Gaudin à son fils, pour lequel il avait écopé d’un an d’inéligibilité. Il sera jugé le 2 décembre dans une autre affaire pour « favoritisme » lorsqu’il était maire des 13e-14e entre 2014 et 2017.