Son sourire a irradié la rade pendant neuf ans. De son arrivée, quand il n’était qu’un gamin de Santiago del Estero et de tout juste 19 ans, jusqu’à son départ l’été dernier, en taulier, à 31 ans. Entre-temps, « Facu », touché par le mal du pays, avait repris la direction de l’Argentine, en 2014, avant de revenir en France, à Lyon, en 2017. Après sept petits matches joués avec le Lou, sous la houlette d’un certain Pierre Mignoni, le buffle reposait finalement ses bagages à Toulon… pour ne plus jamais quitter sa région d’adoption. Enfin, presque.

S’il voulait « terminer sa carrière à Toulon », comme il nous le confiait au cœur de l’hiver dernier, l’histoire de Facundo Isa avec le RCT a finalement pris une autre tournure. Non prolongé par son « club de cœur », l’international aux 51 sélections avec les Pumas s’est engagé dans le Béarn, à Pau.

Dans la peau d’un adversaire

Mais nul doute que ce samedi après-midi, sa descente du bus aura une tout autre saveur. Pour la première fois de sa vie, « Facu » la vivra avec un autre écusson sur le cœur. Il ne fendra pas la foule de supporters, non. Au cœur de Mayol, il découvrira également les vestiaires visiteurs. Plus exigus, moins toulonnais. Et au moment de pénétrer sur la pelouse, le massif troisième ligne (1,88 m pour 114 kg) ne défendra pas le blason qu’il a toujours fièrement porté. Pourtant, et là aussi il n’y a aucun doute, Mayol réservera un accueil des plus chaleureux à l’un de ses plus grands chouchous lorsqu’il entrera en jeu, n°20 dans le dos. À commencer par les Fils de Besagne, club de supporters dont il a été le parrain.

Irréprochable depuis le début de la préparation, Rayan Rebbadj disputera son premier match de la saison face à Pau. Photo Frank Muller

Facundo Isa l’a avoué lui-même dans les colonnes de Midi Olympique, « beaucoup de choses se sont passées dans [sa] tête au moment d’enfiler un nouveau maillot ». Et d’ajouter : « C’était un peu dur, mais aussi très excitant. J’ai fait plus de la moitié de ma carrière à Toulon. J’en ai bien profité. J’ai vraiment adoré mes années là-bas. Mais se fixer un nouveau challenge est important pour un joueur. »

Sur le terrain, il retrouvera ses anciens frères d’armes. Un rendez-vous forcément chargé d’émotion. À tel point que cette semaine, son entraîneur, Sébastien Piqueronies, a tenté de le préserver de toute forme de pression. Pas de prise de parole, pas d’interview. Concentration maximale.

Et ses ex-coéquipiers, eux, ont-il hâte de le retrouver ? De recroiser le fer avec le tronc d’arbre qu’il est ? Dany Priso Mouangué sourit : « Il est venu nous voir la semaine dernière à Bayonne. Évidemment que ça va être bizarre. Pour ce qui me concerne, ça faisait trois ans que je jouais avec lui. “Facu”, c’est un ami. On connaît ses qualités et on sait qu’il ne va pas nous faire de cadeau. »

« En revenant ici, il voudra montrer toutes ses qualités »

Et de détailler : « On est amis en dehors, mais pendant le match, je peux vous dire qu’on ne le sera pas. On sait que quand il va prendre le ballon, il faudra se mettre en face… et bas (sourire). Sinon, tu risques de te retrouver dix ou quinze mètres derrière. En revenant ici, il voudra montrer toutes ses qualités. Mais on est prêt à l’accueillir comme il faut ! On lui a juste dit : “À la semaine prochaine”. Je pense qu’on va bien s’amuser ! Et même s’il est en face, je suis sûr que le public sera content de le retrouver. »

Alors oui, pendant 80 minutes, Facundo Isa sera un simple Palois. Mais aussitôt la sirène retentie, il pourra tomber dans les bras de ses ex-coéquipiers. Parce que s’ils ne sont plus partenaires, nul doute qu’ils sont toujours amis. Et ça, ni « Facu », ni le vestiaire toulonnais, ne l’a oublié. Il est et restera, du haut de ses 158 matches sous le maillot frappé du muguet, un enfant de Mayol.

Charles Ollivon (à g.) retrouve la compétition après neuf mois d’absence. Photo Valérie Le Parc