Le contraste est frappant. Il est 8 h, en ce jeudi de fin septembre. Dans la halte SNCF de Saint-Jacques-de-la-Lande, un train s’arrête en provenance de Redon, direction Rennes. Une personne en descend, une personne monte. Et c’est tout. Juste à côté, au feu sur la route départementale 177, la quatre voies qui relie Rennes à Redon, une file de voitures impressionnante crée un bouchon de plus d’un kilomètre. Une habitude aux heures de pointe. Pour parachever le tableau, les cyclistes vont et viennent en nombre sur la passerelle qui enjambe la gare, pour rejoindre Rennes via les deux pistes cyclables.
Les chiffres confirment cette impression de gare fantôme. En 2024, 4 700 voyageurs sont passé par la gare de Saint-Jacques-de-la-Lande – soit un peu plus de 10 par jour en moyenne. « Une fréquentation assez faible », reconnaît la Région Bretagne, en charge de l’organisation du TER Bretagne. Et même famélique, si on compare avec la fréquentation des deux gares desservies à une poignée de kilomètres en amont, celles de Ker Lann (95 000 voyageurs en 2024) et Bruz (259 000). Des chiffres, en baisse de 64 % par rapport à 2015 (12 966 voyageurs), qui en font la gare la moins fréquentée du bassin rennais.
« C’est un quartier peu peuplé »
Pourtant, aux heures de pointe, la gare située au sud de Rennes est correctement desservie : cinq arrêts avant 9 h le matin en direction de Rennes, idem le soir entre 17 h et 20 h. « Dans le périmètre de Rennes Métropole, c’est la gare où l’offre TER est la moins importante, à l’exception de la branche Rennes – Châteaubriant qui ne peut techniquement pas avoir plus que 14 arrêts quotidiens », tempère la Région.
Ce matin-là, à l’heure d’embaucher, l’unique voyageur croisé pour prendre ce train en direction de Rennes, c’est Pascal. Cette ligne, il la prend « tous les jours depuis dix ans. Il faut reconnaître qu’il n’y a pas grand-monde aux heures de pointe. J’habite dans le quartier de Saint-Jacques aéroport et je travaille à deux pas de la gare de Rennes. Pour moi, c’est pratique, je suis à Rennes en six minutes. » Il l’admet cependant, « dans le quartier, mes voisins ne prennent pas le train. Beaucoup se déplacent à vélo, en voiture ou en bus ». « C’est un quartier assez peu peuplé, 2 000 habitants, pointe la maire de la commune, Marie Ducamin. Qui plus est, Rennes est très proche et la ligne de bus C6 fonctionne bien depuis le quartier. Et elle est un peu loin du quartier de La Morinais, ce qui rend cette gare assez confidentielle. »
« Il faudra renforcer la connexion avec La Janais »
Mais alors, pourquoi cette gare est-elle toujours desservie ? La réponse se trouve non loin de là, du côté de La Janais. Ce jeudi matin-là, les voyageurs qui descendent du train se rendent tous dans cette zone d’activité. Et particulièrement au sein des locaux du Technicentre de la SNCF, rue des Champs Ruffaux, à deux pas de la gare. « Ce matin, on est quatre collègues à être descendus, et entre sept et dix habituellement à cette heure-là, explique Stéphane, qui vient de Messac. On est proche du parking-relais de Saint-Jacques Gaîté, mais pas assez pour venir à pied. Cette gare, il faut qu’elle se développe pour inciter les salariés des autres usines à prendre le train. »
À ce jour, « 2 100 salariés travaillent sur le site de La Janais, et on en attend à terme 4 300 », explique Marie Ducamin. Avec le développement de cette zone, hôte historique de PSA, via notamment l’arrivée programmée de Safran, la gare pourrait voir son débit de voyageurs augmenter. « Il faudra renforcer la connexion avec la ZAC pour les salariés », estime Marie Ducamin. De fait, cette gare ne dispose pas de parking, « et on n’a pas de foncier pour en faire ». Pour se rendre au Technicentre, les cheminots empruntent une petite route sans trottoir et mal éclairée, à pied.
« La connexion avec l’aéroport peut également être meilleure car l’aérogare est assez éloignée. J’espère que l’arrivée du Trambus le permettra. » Prévue pour une mise en service en 2030, la ligne T4 de Trambus, qui reliera le parc-relais Saint-Jacques Gaîté à Bruz, passera, selon les derniers plans, par l’aéroport, mais aussi la gare. Qui pourrait, alors, se sentir un peu moins seule.