Disons-le tout net, Orlando n’est pas le plus agité des opéras du monde. Musicalement, pourtant, ça donne le frisson, surtout quand Christophe Rousset est à la direction d’orchestre comme dans la production donnée à Nancy.

L’intrigue tient sur une demi-feuille de papier à cigarette. Les récitatifs racontent l’histoire et les airs sont là d’abord pour montrer la virtuosité du chanteur – et être facilement mémorisables, en les répétant plusieurs fois. Autant dire que si le spectateur n’est pas prêt à se laisser porter par le rythme, ça peut être très fortement ennuyeux…

Jeanne Desoubeaux, la metteuse en scène, bien consciente de cet écueil, a cherché une lecture intéressante. Elle propose une nuit au musée, un peu cliché, elle le reconnaît, mais qui offre une référence facile pour tout le monde : les tableaux prennent vie devant les regards des enfants.

Quatre d’entre eux deviennent ainsi petit à petit des doubles des quatre protagonistes, sous le regard d’un mage/gardien de musée/manipulateur en chef. Les deux niveaux de lecture de l’histoire se mêlent harmonieusement. Maligne, Jeanne Desoubeaux finit par les fusionner, faisant de ces enfants les héros jeunes : quand le chanteur interprète son air, l’enfant offre le spectacle.

L’œil et l’oreille ont de quoi faire

Pas un instant, l’œil n’est inoccupé, d’autant que le décor ne cesse d’être manipulé à vue, les techniciens de l’opéra devenant des figurants en plein travail technique.

L’oreille n’a plus qu’à se complaire avec cette distribution homogène : choix voulu de Jeanne Desoubeaux, quatre femmes tiennent les quatre rôles, deux hommes et deux femmes (les rôles masculins peuvent parfois être tenus par des contre-ténors).

Un étourdissement général

La carrure athlétique de Noa Beinart laisse toujours le trouble sur son Orlando qui prend de l’épaisseur au fur et à mesure qu’il plonge dans la folie.

Le chevalier Medoro (Rose Naggar-Tremblay), la princesse Angelica (Mélissa Petit) et la mutine Dorinda (épatante Michèle Bréant) sont ainsi l’objet d’un trio « hot », une scène d’effeuillage sensuelle et suggestive qui joue sur les confusions des genres. Sur scène, un homme et deux femmes, joués par trois femmes, allez vous y retrouver ! De cet étourdissement général, musique, costumes, cavalcades, baisers, surgit un bonheur de bout en bout. En plus, rassurez-vous : ça finit bien.

Opéra national de Nancy-Lorraine, mardi 7 et jeudi 9 octobre, à 20 h. Plus de photos sur www.estrepublicain.fr