La décision est tombée en début de semaine dernière. Le projet d’implantation d’une usine de production de 3 400 tonnes de paracétamol à Toulouse (Haute-Garonne) semble se concrétiser davantage avec l’autorisation environnementale délivrée à Ipsophène par la préfecture de Haute-Garonne, « permettant l’installation et l’exploitation d’une unité de fabrication de paracétamol selon un procédé innovant ». « Son autorisation environnementale a été délivrée selon les modalités introduites par la loi Industrie verte, au terme d’une consultation du public de trois mois et de réunions d’information », précise la préfecture dans son communiqué.

Sur ce point, Jérôme Favrel, président du comité de quartier Croix-de-Pierre, pointe les nombreuses réserves soulevées par le commissaire enquêteur. En effet, à la suite de la consultation publique, ce dernier juge le projet « globalement cohérent dans sa logique industrielle et environnementale », mais relève « plusieurs points de vigilance », dont « la localisation du projet sur un site classé Seveso seuil haut », « la circulation de matières dangereuses sur un itinéraire présentant des contraintes d’infrastructure » ou encore « l’inadéquation du projet avec les ambitions de reconversion de l’île du Ramier en espace de loisirs ».

La conclusion du commissaire enquêteur est ainsi bien plus nuancée qu’un simple avis pour ou contre : « Pris isolément ou dans leur globalité, ces éléments pourraient, selon l’importance qu’on leur accorde, justifier un avis réservé, voire défavorable, de la part du commissaire enquêteur dans le cadre d’une enquête publique. »

« On ne sait rien sur le traitement des déchets »

« On n’a aucun retour sur l’analyse de ces points. La préfecture donne l’impression que ça n’a pas existé », regrette Jérôme Favrel, qui souligne par ailleurs que la Mairie de Toulouse et Toulouse Métropole ne se sont pas exprimées dans cette enquête. « C’est une forme de chèque en blanc à un projet qui a de nombreux problèmes. »

Le président du comité de quartier Croix-de-Pierre estime par ailleurs que le site est bien classé Seveso, seuil bas, mais « très proche du seuil haut ». « Sous prétexte que tous les déchets sont évacués en camion du site, on ne sait rien sur le traitement des déchets », ajoute-t-il, avançant le chiffre de 6 tonnes de dérivés de phénol par jour.

Dans sa décision, la préfecture indique que « l’autorisation environnementale délivrée encadre strictement les mesures de maîtrise des risques. À la suite de l’instruction, des mesures complémentaires de maîtrise des risques ont été prescrites par le préfet pour renforcer la sécurité de l’activité, et améliorer la capacité de l’exploitant à réagir de manière précoce à la survenue de certains types d’incidents. (…) L’implantation d’Ipsophène sur ce site est rendue compatible par la création d’une plate-forme industrielle au sens de la loi Pacte, qui intègre une gestion mutualisée de la prévention des risques et des accidents ».

Pour rappel, Ipsophène a obtenu une enveloppe de l’État de 3,6 millions d’euros sur les 28 millions du projet, dans le cadre de France 2030, tandis que la région Occitanie a déjà versé 4,2 millions d’euros pour soutenir la construction de l’usine. « On a l’impression que le mot innovant donne une espèce de sésame empêchant les administrations de faire leur travail », regrette pour sa part Jérôme Favrel, qui se dit ouvert à un débat avec les responsables d’Ipsophène sur tous ces points.