La descente de police n’est pas passée inaperçue dans ce petit hôtel particulier de la rue de Paris au pied du parc Thabor à Rennes. Une quarantaine de policiers du Raid, de la Dcos (ex-police judiciaire) ont débarqué vers minuit trente dans la nuit de jeudi 17 à vendredi 18 avril. Dans l’escalier de bois en colimaçon, ils sont montés discrètement jusqu’au 3e étage et ont défoncé la porte en bois à coups de bélier. À l’intérieur : trois hommes âgés d’une vingtaine d’années soupçonnés d’avoir participé, quelques heures auparavant, à la fusillade dans le quartier Villejean. Un 4e homme avait été interpellé par les gendarmes dès 19 h 30 à côté du véhicule en feu qui avait servi à transporter les assaillants.

« Ça sentait le cannabis dans la cage d’escalier »

« On a entendu un peu de bruit mais pas tant que cela finalement, explique un habitant du 33 rue de Paris. C’était impressionnant de voir tous ces policiers venus en voitures banalisées. » Les occupants de ce petit immeuble qui compte un seul appartement par étage ne connaissaient pas leurs voisins du 3e. « Ils étaient arrivés en janvier. On pensait que c’étaient des étudiants, ajoute le voisin du 2e étage. Ces jeunes faisaient des fêtes de temps en temps, mais ils n’étaient jamais trop nombreux. Ça sentait régulièrement le cannabis dans la cage d’escalier. »

Le procureur de Rennes, Frédéric Teillet, explique que les quatre jeunes hommes interpellés entre le 17 et le 18 avril sont âgés de 21 à 23 ans. « Ils sont impliqués dans le trafic de produits stupéfiants organisé par un réseau d’individus originaires de la région parisienne sur la dalle Kennedy, depuis le mois de janvier 2025 », détaille-t-il dans un communiqué.

Selon nos informations, le commanditaire de la fusillade est originaire de la région parisienne. Depuis fin d’année 2024, cet homme a recomposé une équipe à sa main pour reprendre le point de deal du «10 Bourbonnais». Il y est arrivé en multipliant les fusillades. Sauf que les « Villejeannais » qui exploitaient le point de deal auparavant ne se sont pas laissés faire. Le 14 avril dernier, après plusieurs jours d’assauts violents, ces derniers sont parvenus à reprendre leur point de deal. Les consignes du patron parisien ne sont pas faites attendre. Il a demandé à ses hommes de viser plusieurs dealers « locaux » très connus dans le quartier afin qu’ils ne ressortent pas vivant de cette offensive.

Pendant sa garde à vue, un des mis en cause, originaire des Mureaux (Yvelines) a reconnu son implication dans le trafic de produits stupéfiants et sa participation au commando : il était notamment chargé de filmer la scène pour le commanditaire et de brûler le véhicule, qu’il savait volé et à proximité duquel il a été interpellé.

Un scellé portant la mention « tentative de meurtre en bande organisée » est placardé sur la porte de l’appartement perquisitionné par la police suite à la fusillade du Subway de Villejean.Un scellé portant la mention « tentative de meurtre en bande organisée » est placardé sur la porte de l’appartement perquisitionné par la police suite à la fusillade du Subway de Villejean. (Le Télégramme/Claire Staes)

Un autre mis en cause, originaire de Tours, n’a reconnu qu’une participation aux faits de trafic de produits stupéfiants « en expliquant n’être qu’un chouf pour 100 euros/jour », mais les investigations ont permis de le mettre également en examen des chefs d’association de malfaiteurs et tentative de meurtre en bande organisée.

Le troisième gardé à vue, originaire de Marseille, a choisi de garder le silence. Il a été mis en examen pour de nombreux chefs d’inculpation dont tentative de meurtre en bande organisée. Au vu des investigations menées, sa participation est active, tant dans le cadre du trafic sur la dalle Kennedy que dans le déchaînement de violences du 17 avril 2025. Le 4e mis en examen, originaire de Tours, devra répondre de trafic de produits stupéfiants et association de malfaiteurs en vue de la préparation un crime. Le procureur ajoute : « ces 4 jeunes hommes présentent des casiers judiciaires déjà fournis, ayant été condamnés pour des trafics de produits stupéfiants ou des violences, démontrant leur ancrage marqué dans ce type de délinquance. Leur équipement (armes, vêtements, voiture volée…) et leur mode opératoire ont démontré leur détermination extrême à reconquérir par tous moyens le point de deal, à la demande de leurs commanditaires, en éliminant physiquement leurs concurrents et en prenant le risque de blesser, en plein après-midi, toute personne se trouvant à proximité. » Ils ont été placés en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention.