La signature de l’accord de Turnberry entre l’Union européenne et les Etats-Unis n’empêche pas Donald Trump de déclarer régulièrement la création de nouveaux droits de douane. Lavabos, meubles de cuisine, médicaments brevetés ou encore camions… Les annonces de nouvelles surtaxes sur les importations de la part du président américain n’en finissent pas. Dans ce contexte marqué par l’incertitude, « on commence à voir les signes d’un ralentissement des exportations françaises vers les Etats-Unis depuis le début de l’été », commente Yann Ambach, chef du bureau de la politique commerciale et tarifaire des douanes françaises.
Des secteurs inégalement touchés
Tous les secteurs ne sont pas concernés au même niveau. « L’aéronautique, où les droits de douane sont restés à zéro, est beaucoup moins touchée que les vins et spiritueux qui font face à la hausse de 15 % côté américain mais qui subissent aussi les mesures anti-dumping prises par la Chine », explique Yann Ambach. D’autres secteurs comme la chimie, incluant les cosmétiques et les parfums, font face à une incertitude alors qu’ils sont fortement exportateurs.
« La baisse du dollar est très pénalisante pour nos entreprises »
La hausse des droits de douane n’explique pas à elle seule la situation défavorable dans laquelle peuvent se retrouver les entreprises de certains secteurs. « La baisse du dollar est très pénalisante pour nos entreprises, plus que la hausse des droits de douane, car elle rend les exportations américaines plus compétitives et pénalise les exportations européennes vers les Etats-Unis », souligne Yann Ambach. La dépréciation du dollar, de l’ordre de 10 %, s’ajoute aussi à une monnaie chinoise qui là encore pénalise l’exportation européenne.
Des anticipations du côté des entreprises
Les entreprises exportatrices semblent en tout cas avoir anticipé les décisions de Donald Trump. Le 1er trimestre 2025 a ainsi vu une très forte hausse des exportations vers les Etats-Unis notamment dans le secteur des vins de Bourgogne et de Bordeaux. « Ils ont représenté près de 115 millions d’euros d’exportation alors que le Bordelais exporte généralement pour 200 à 300 millions d’euros de produits par an », commente Yann Ambach.
La hausse des exportations a aussi été marquée dans le secteur du luxe et de la maroquinerie. Ces augmentations sectorielles se sont traduites dans les résultats globaux, poursuit Yann Ambach : « En glissement annuel, on observe une hausse des exportations de 6 % vers les Etats-Unis par rapport au 1er trimestre 2024 ».
Comment faire baisser la facture ?
Dans ce contexte, « la principale préoccupation des entreprises, c’est l’instabilité et son impact financier, alors qu’une politique commerciale se bâtit sur plusieurs années », rapporte Yann Ambach.
De leur côté, « les douanes accompagnent les entreprises sur plusieurs niveaux, en les informant via le site des douanes, en intervenant auprès des secteurs et organisations patronales, en facilitant le dédouanement des produits et en faisant bénéficier les entreprises des avantages des accords commerciaux signés par l’Union européenne », détaille le chef du bureau.
Plus d’une cinquantaine d’accords existent, dont le dernier en date a été signé avec le Chili et le prochain avec le Mexique.
Une ouverture vers de nouveaux marchés
Si les entreprises peuvent s’inscrire dans la durée avec une politique d’implantation aux Etats-Unis pour trouver une solution, elle peuvent aussi trouver d’autres sources d’exportation. Les échanges transatlantiques avec le Canada et le Mexique ont connu une hausse significative depuis la mise en place des mesures Trump.
Au Mexique, le prochain accord commercial prévoit des droits de douane à taux zéro pour les importations de vins et spiritueux, de quoi permettre à la filière de développer un nouveau marché. Des négociations sont aussi en cours avec l’Inde et l’Indonésie avec des enjeux importants sur les produits agricoles.