Face à une concurrence chinoise jugée écrasante et déloyale, la Commission européenne a présenté ce mardi un arsenal inédit pour défendre son acier : réduction massive des quotas d’importation, doublement des droits de douane, et nouvelles obligations de traçabilité. L’objectif est clair : enrayer l’hémorragie et sauver une industrie en crise.

« En 2024, 18.000 emplois directs ont été supprimés dans la sidérurgie, c’est trop et cela devait cesser », a déclaré le vice-président de la Commission, Stéphane Séjourné, en présentant les mesures à la presse.

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J’accepteUne riposte économique sans précédent

Bruxelles prévoit de réduire de 47 % les volumes d’acier étrangers pouvant entrer au sein de l’Union européenne sans droit de douane. Ces quotas passeront à 18,3 millions de tonnes, ce qui représente le niveau de 2013, avant que la surproduction mondiale, et notamment chinoise, ne bouleverse le marché. « Les surcapacités mondiales sont cinq fois plus importantes que la consommation d’acier annuelle de l’UE », a rappelé le commissaire au Commerce, Maros Sefcovic.

Les importations dépassant ces quotas seront désormais taxées à hauteur de 50 %, contre 25 % aujourd’hui. Ils grimperont ainsi à des niveaux similaires à ceux mis en place aux Etats-Unis et au Canada, selon les propositions de la Commission, qui doivent encore être validées par les 27 et le Parlement européen. Autre nouveauté : les importateurs devront déclarer le pays dans lequel l’acier a été « fondu et coulé », et ce, afin d’empêcher le contournement des droits de douane via des circuits de transformation.

« Au bord de l’effondrement »

Le plan, que Stéphane Séjourné décrit comme une stratégie pour « sauver » les « aciéries et les emplois européens », remplacera en 2026 la « clause de sauvegarde » instaurée en 2019. « L’industrie sidérurgique européenne était au bord de l’effondrement. Nous la protégerons pour qu’elle puisse investir, décarboner et ainsi redevenir compétitive », a insisté le vice-président.

Les industriels, eux, accueillent ces annonces comme un signal vital. « Au nom de tous les salariés d’Arcelor Mittal en Europe, je suis sincèrement soulagé », a réagi Aditya Mittal, le patron du groupe, remerciant l’UE « d’avoir compris la gravité de la situation et d’avoir agi de manière ferme et adaptée ». L’organisation professionnelle du secteur, Eurofer, a, elle aussi, applaudi « une bouée de sauvetage pour les sidérurgistes et les ouvriers ».

Notre dossier sidérurgie« Agir maintenant »

La présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, appelle désormais à accélérer le calendrier. « Nous devons agir maintenant », a-t-elle martelé, exhortant au passage les Vingt-sept et les eurodéputés à adopter « rapidement » le dispositif.

En parallèle, Bruxelles poursuit ses discussions avec Washington pour obtenir une exemption des droits sur l’acier européen et ainsi former un front commun face à Pékin. La Chine reste, de loin, la première puissante sidérurgique mondiale, avec plus d’un milliard de tonnes produites en 2024, soit plus de la moitié de la production planétaire. À titre de comparaison, l’Inde n’en a produit que 149 millions, le Japon 84, les États-Unis 79 et la France moins de 11. L’Allemagne, principal producteur européen, plafonne à 37 millions de tonnes. Les industriels européens, fragilisés par la hausse des coûts et la pression asiatique, continuent d’enchaîner les restructurations : Thyssenkrupp cherche à céder sa division acier à l’Indien Jindal Steel, tandis qu’en France, Arcelor Mittal vient de supprimer 600 postes et menace de suspendre la décarbonation de ses hauts-fourneaux à Dunkerque.