Les surprises se succèdent avec la maire du VIIIe arrondissement de Paris. Libération a révélé vendredi 3 octobre que Jeanne d’Hauteserre, en charge de la mairie depuis son élection en 2014, avait dépensé 35 779 euros en vêtements grâce à l’argent des contribuables parisiens entre 2020 et 2024. Libé s’était en effet plongé dans les milliers de factures remises à la mairie de Paris en guise de justificatifs des frais de représentation auxquels ont droit les maires d’arrondissement de la capitale. Chacune et chacun d’entre eux peut utiliser 11 000 euros par an, versés en douze mensualités et qui doivent être justifiés. L’argent non dépensé est reversé dans les caisses de la mairie.
Ce mardi, Jeanne d’Hauteserre – qui ne fait quasiment aucune note de frais au restaurant, mais a acheté, pendant la mandature en cours, des habits à tour de bras – annonce, selon une information du Parisien, qu’elle souhaite rembourser les sommes utilisées pour se vêtir. Il faut dire que les arguments de l’édile LR pour justifier les milliers d’euros dépensés n’avaient pas été du meilleur effet. «Il y avait des soldes, j’ai eu la possibilité d’acheter de belles choses, voilà», avait-elle expliqué, confrontée à sa frénésie d’achats de décembre 2023 – en trois semaines seulement, elle avait claqué plus de 7 000 euros chez Maje, Sandro, Eric Bompard, Carven, Herno et Apostrophe.
«J’assume», crânait-elle auprès de Libé. Tout en estimant qu’il faudrait «désormais supprimer ces frais» de représentation. Comprenne qui pourra… Cette enveloppe est pourtant encadrée par un «memento», publié en 2020 par la ville, qui fixe les règles relatives aux frais du ou de la maire de Paris et de ses arrondissements. Sont incluses dans les «frais liés à l’apparence» les dépenses «vestimentaires (achat d’habillement et entretien ou frais de pressing)», avec pour seul principe : «Les dépenses doivent être liées à l’exercice des fonctions de représentation et non à des dépenses courantes.»
Sur le plateau de BFM TV samedi, l’ancienne collaboratrice du ministre chiraquien Bernard Pons a remis une pièce dans la machine, plus qu’elle n’a convaincu les téléspectateurs. «Je comprends tout à fait qu’une personne qui gagne 1 200 euros par mois puisse être choquée qu’on puisse avoir 990 euros [mensuels] de frais de représentation, a analysé Jeanne d’Hauteserre. Et j’en profite pour remercier tous nos concitoyens et concitoyennes qui travaillent et qui nous permettent d’avoir ces indemnités.» La maire essayait en tout cas «d’acheter des produits français et de bonne qualité», avait-elle ajouté.
Au Parisien, Jeanne d’Hauteserre assure désormais qu’elle va saisir la commission de déontologie de la mairie pour restituer les montants dépensés au titre de ces frais de représentation. «Ces dépenses sont légales mais elles choquent nos concitoyens, a-t-elle expliqué. Je vais saisir les services juridiques de la ville pour voir dans quelle mesure ce remboursement est possible et comment il faut procéder. Si la commission accepte, je serai alors la première élue à procéder ainsi. J’espère que d’autres suivront.»
A voir. Au cours de l’enquête menée à Libération, le maire LR du XVe arrondissement s’était engagé à rembourser le montant de plusieurs «menus enfants» portés sur des justificatifs de notes de restaurants. Philippe Goujon avait suggéré des «erreurs» et assurait alors qu’il reverserait «à la ville» les quelques dizaines d’euros correspondantes.
Dans un communiqué publié mardi après-midi, Jeanne d’Hauteserre écrit que «les responsables publics doivent être exemplaires et partager les efforts demandés à chacun», et qu’elle est à ce jour «la seule élue parisienne à mettre pleinement en cohérence ses propos et ses actes, sans attendre la prochaine mandature». L’élue «entend ainsi affirmer son engagement pour une vie publique transparente et appelle ses collègues à s’inscrire dans cette même démarche de responsabilité». Mieux vaut tard que jamais.