C’est un nouveau coup porté aux très mauvaises relations entre la junte militaire en place à Ouagadougou depuis près de trois ans et la France. Trois responsables européens de l’ONG INSO, dont deux Français, ont été arrêtés au Burkina Faso.

Au total, huit membres d’INSO ont été arrêtés pour espionnage : le directeur pays, un Français, son adjointe franco-sénégalaise, le directeur général adjoint tchèque de l’organisation basée à la Haye (Pays-Bas) ainsi qu’un ressortissant malien et quatre burkinabè, a annoncé mardi la junte.

L’ONG suspendue le 31 juillet

Le directeur pays avait été arrêté fin juillet au moment où l’ONG avait été suspendue trois mois par les autorités pour « collecte de données à caractère sensible sans autorisation préalable ». L’ONG fournit notamment des analyses sécuritaires pour d’autres associations humanitaires.

Selon le ministre de la Sécurité Mahamadou Sana, « INSO, est une ONG étrangère, dirigée par des étrangers, qui collectait et fournissait des informations sécuritaires sensibles pouvant être préjudiciables à la sécurité nationale et aux intérêts du Burkina Faso, à des puissances étrangères ». Il a précisé mardi que malgré la suspension de ses activités décrétée le 31 juillet, certains responsables « ont continué à mener clandestinement ou de façon détournée des activités telles que des collectes d’informations et de réunions en présentiel ou en ligne ».

La France accusée de vouloir déstabiliser le Burkina

Les dates des arrestations n’ont pas été précisées par le ministre qui a toutefois ajouté que le directeur général adjoint de l’ONG s’est rendu à Ouagadougou le 8 septembre, malgré la suspension.

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La junte du capitaine Ibrahim Traoré fait face aux violences de djihadistes qui frappent de larges pans de son territoire. Elle a rompu avec plusieurs puissances occidentales, la France en tête, régulièrement accusée de vouloir déstabiliser le pays, ce que Paris nie. Elle a exigé le départ en 2023 des soldats engagés dans la lutte antijihadiste et a expulsé des diplomates français l’an dernier.

Quatre fonctionnaires français accusés d’espionnage avaient aussi été détenus pendant un an à Ouagadougou, avant d’être libérés en décembre 2024 avec l’aide d’une médiation marocaine. Entre juin et juillet, la junte a par ailleurs révoqué en l’espace d’un mois l’autorisation d’exercer de 21 ONG et suspendu dix autres associations pour une durée de trois mois.

Les voix critiques du régime sont durement réprimées au Burkina Faso où de nombreux cas d’enlèvement d’individus ont été rapportés dans le pays depuis plus d’un an. Le capitaine Traoré est notamment accusé d’utiliser de manière abusive un décret de mobilisation générale permettant d’enrôler de force des citoyens sur le front. Ces derniers mois, le régime a libéré une dizaine de personnes enlevées ou arrêtées puis mobilisées, notamment deux figures de la société civile lundi soir.