Par

Thomas Bernard

Publié le

8 oct. 2025 à 18h45

Ancien ouvrier paysagiste, agricole et chauffeur poids lourd, Julien Guillard, habitant de Saint-Herblain, déclare, en 2015, un cancer à l’âge de 32 ans. Un lymphome non hodgkinien, une sorte de cancer du sang. Une maladie provoquée par l’utilisation répétée de pesticides, fongicides, herbicides dans sa profession. Depuis le quadragénaire est en rémission. Il décide de lancer une procédure en reconnaissance de maladie professionnelle et l’obtient le 19 avril 2017.

Quelques mois plus tard, engagé avec l’association Phyto-Victimes dans la mise en œuvre du FIVP (Fonds d’indemnisation des victimes des pesticides), Julien Guillard, accompagné de son avocat François Lafforgue, engage une procédure de faute inexcusable contre ses employeurs. Le but est d’obtenir une réparation intégrale des préjudices à l’image du FIVA (Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante).

L’ancien employé agricole a été débouté de sa demande par le Tribunal de Nantes, le 5 septembre 2025.

Soutenu par le Collectif des victimes des pesticides de l’ouest, Phyto-Victimes, la CGT et ses proches, le Manceau d’origine a décidé de faire appel. Un combat qu’il mène pour lui, mais aussi pour toutes les personnes victimes des pesticides.

« On doit la sécurité et la santé aux employés »

Suite à la décision du tribunal, Julien Guillard ne veut pas lâcher l’affaire même si la pilule est difficile à avaler.

« Ce n’est pas acceptable de reconnaître par deux fois le fait que je sois victime des pesticides. D’un côté, on dit que les gaz d’échappements, l’utilisation des produits phytosanitaires ont eu un impact sur ma santé. Et d’un autre côté, il n’y a pas de responsable et que le seul responsable ce soit la victime. »

Dans son combat de reconnaissance en maladie professionnelle, l’ancien ouvrier agricole est accompagné par le Collectif des victimes des pesticides de l’ouest, dont fait partie Gilles Ravard, agriculteur retraité, handicapé à 75 % à cause d’un lymphome.

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« On a fait reconnaître, à l’arrache parfois, la maladie professionnelle à 280 personnes », précise Gilles Ravard.

Reconverti, Julien Guillard, n’en veut pas à ses patrons, mais il dénonce, aux côtés du Collectif des victimes des pesticides de l’ouest, un manque de prévention concernant la dangerosité des produits pour les ouvriers du monde agricole. La manière de porter les équipements de protection individuelle (EPI) est notamment pointée du doigt.

Quand on est patron on doit la santé et la sécurité aux employés.

Julien Guillard

« Les combinaisons sont mal portées car l’agriculteur va mettre la combinaison une fois, deux fois, trois fois et donc elle ne fait plus son boulot. Pire, elle est tellement infestée de produits qu’elle va diffuser », cite l’Herblinois. « Beaucoup d’agriculteurs ne veulent pas porter d’EPI parce qu’ils ne veulent pas passer pour un cosmonaute », regrette Gilles Ravard.

Sensibiliser le monde agricole

Selon Gilles Ravard, le collectif reçoit quotidiennement des appels d’employés du monde agricole ou de riverains, tous impactés par les pesticides au niveau sanitaire. Avec le combat mené par Julien Guillard, le collectif veut que le monde agricole prenne conscience des enjeux.

Il y a une omerta dans le monde agricole sur les pesticides au travail (…). Pendant des années, j’ai utilisé ces pesticides. Aujourd’hui, on se rend compte qu’on ne peut plus faire comme ça et on sait faire autrement (sic), sans pesticides. Notre combat est contre les pesticides pour la santé publique. Il faut casser cette omerta. Les gens n’osent pas dire.

Gilles Ravard

Pour casser cette omerta et sensibiliser, le collectif de soutien aux victimes des pesticides de l’ouest intervient dans les écoles agricoles et organise des ciné-débats. « Il faut aussi des témoignages. Je salue le combat de Julien qui est très courageux », souligne Gilles Ravard.

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