Les aliments ultra-transformés sont déjà dans le collimateur des scientifiques depuis une quinzaine d’année, une prise de conscience généralisée qui a eu lieu aux alentours des années 2010. Beaucoup sont bien trop riches en additifs, conservateurs, arômes artificiels et autres substances dont notre organisme n’a absolument pas besoin pour fonctionner normalement. Certaines d’entre elles ont même été classées comme dangereuses (cancérigènes, mutagène, reprotoxiques, etc.) et bannies de l’industrie agroalimentaire dans l’Union européenne.
Des chercheurs de l’Université Virginia Tech ont souhaité creuser un peu cette problématique et identifier plus précisément quelles catégories d’aliments industriels étaient les plus délétères. Non pas pour notre santé cardio-vasculaire ou notre métabolisme comme c’est le cas de nombreuses études, mais pour notre santé cérébrale. Leur étude a été publiée un peu plus tôt cette année, au mois de mai, dans le volume 121 de la revue The American Journal of Clinical Nutrition.
Sodas et viande ultra-transformées : une menace pour nos fonctions cognitives
Les chercheurs ont ainsi suivi pendant sept ans plus de 10 000 américains âgés de 55 ans et plus, issus d’un programme national de recherche américain suivant l’état de santé et les habitudes de vie des seniors (Health and Retirement Study).
Tous les deux ans, les chercheurs ont évalué la mémoire et les capacités cognitives des participants à l’aide de tests standardisés : rappel de mots à court et à long terme, exercices de calcul mental et de soustraction en série. Des exercices simples, mais qui permettent de détecter précocement le moindre signe de déclin cognitif, y compris chez les personnes au stade de pré-démence.
Au bout de ces sept ans, les chercheurs sont parvenus à deux conclusions. La première, que les personnes consommant au moins une portion de viande ultra-transformée par jour (charcuteries industrielles, viandes de supermarché, plats prêts à réchauffer) souffraient davantage de difficultés de mémoire, d’attention et de raisonnement, avec une fréquence 17 % plus élevée que chez les autres participants.
La seconde portait sur les boissons gazeuses sucrées : les consommateurs quotidiens de soda présentaient, eux aussi, les mêmes difficultés. Même si la fréquence était moindre, elle a été calculée autour des 6 % pour chaque verre avalé.
Selon Brenda Davy, professeure en nutrition humaine et co-autrice de l’étude, il ne s’agit pas de diaboliser ces aliments ou de les interdire. Quel que soit le domaine dont il est question, nous savons très bien à quel point il est inutile de condamner un comportement sans changer les conditions qui le rendent inévitable.
Pour la chercheuse, la sensibilisation est la priorité : « Il existe des charcuteries peu transformées et de meilleure qualité. Ce qu’il faut, c’est apprendre à lire les étiquettes, cuisiner davantage et privilégier l’eau plutôt que les boissons sucrées », explique-t-elle.
Les chercheurs souhaitent désormais aller plus loin, puisque leur prochaine étude portera sur les jeunes adultes, afin de déterminer si ces effets apparaissent dès les premières décennies de la vie. À terme, ils espèrent développer des programmes d’apprentissage culinaire pour aider les populations les plus vulnérables à cuisiner sainement. « Suivre un régime, c’est une chose », explique Ben Katz, co-auteur et professeur associé en développement humain à Virginia Tech. « Encore faut-il avoir les compétences pour le mettre en pratique ».
Même si cette étude n’a pas démontré un lien de causalité absolu, la corrélation observée reste forte et assez cohérente avec les effets déjà connus de ce type d’aliment sur notre santé. Il reste néanmoins une problématique sur laquelle cette étude ne s’est pas penchée : c’est que les produits incriminés sont, outre-Atlantique tout du moins, souvent les moins chers et restent plus accessibles pour nombre de personnes en situation de fragilité économique. Des comportements qui relèvent de l’habitus collectif, forgé par les contraintes sociales et le marketing agressif de l’industrie agroalimentaire. Toutefois, il serait indécent de se reposer sur cet argument, comme si ces habitudes relevaient d’un fatalisme contre lequel on ne pourrait pas lutter. Reconnaître l’influence de l’environnement alimentaire n’exclut pas la responsabilité individuelle, mais c’est aux politiques publiques de garantir à chacun la liberté réelle d’exercer ses propres choix.
- Une étude américaine montre que la consommation régulière de viandes industrielles et de sodas est associée à davantage de troubles de la mémoire et de l’attention chez les plus de 55 ans.
- Ces résultats confirment que certains produits ultra-transformés n’affectent pas seulement le corps, mais aussi le cerveau, même à faibles doses et sur le long terme.
- Si les habitudes alimentaires sont largement conditionnées par les inégalités sociales, les chercheurs appellent à une action publique pour rendre une alimentation saine accessible à tous.
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