Il s’agit d’une première depuis le début du conflit : un drone FPV (First Person View, vue à la première personne) à fibre optique russe a frappé la commune de Kramatorsk le 5 octobre, selon le conseil municipal de cette ville de la région de Donetsk. Si l’attaque, qui a touché une voiture, n’a fait aucune victime, l’utilisation d’un drone à fibre optique dans une zone à près de 20 kilomètres du front a de quoi inquiéter. Elle soulève notamment la possibilité d’une utilisation accrue de ces engins pilotés à distance contre des cibles ukrainiennes installées à plusieurs dizaines de kilomètres en arrière du champ de bataille.
Many were surprised yesterday by the news that a Russian fiber-optic FPV drone flew into Kramatorsk and attacked a car.
But there is nothing surprising here. The war of 2025 is already very different from the war of 2024.
From LBZ to Kram — 20 kilometers. Enemy FPVs can fly even… pic.twitter.com/hTfhJFPcxZ— Richard Woodruff 🇺🇦 (@frontlinekit) October 6, 2025
Une innovation lourde de conséquences
Les drones à fibre optique sont une réponse à une tactique de plus en plus répandue sur le front en Ukraine : le brouillage des engins pilotés à distance. A l’inverse des drones classiques contrôlés via des ondes radio, ces modèles sont pilotés à l’aide d’un câble de fibre optique déroulé au fur et à mesure que l’engin avance, les immunisant contre les brouillages. Ce câble alimente également le drone, lui permettant donc de voler sans batterie. Son usage est désormais si répandu que plusieurs vidéos présentent des champs entiers recouverts de câble à fibre optique, à plusieurs kilomètres du front.
Fields full of fiber optic cables from drones in Ukraine pic.twitter.com/SjHiLrCyly
— Preston Stewart (@prestonstew_) August 4, 2025
Cette arme dispose en contrepartie de quelques désavantages, notamment une portée maximale limitée par la longueur de la fibre optique, ainsi qu’une maniabilité moindre, le câble pouvant par exemple se coincer dans des obstacles, tandis que le drone est alourdi par le poids des bobines déroulant le câble. Mais ces problèmes sont amenés à diminuer au fur et à mesure de l’expérience acquise dans la conception de ces drones, qui restent relativement récents.
Comme le souligne le site spécialisé The War Zone, certains modèles de drones à fibre optique ukrainiens comme russes disposent ainsi déjà d’une portée de 40 kilomètres, bien que les engins en service utilisent en général des câbles plus courts.
Menace sur les civils
Cette extension de la portée des drones à fibre optique utilisés par la Russie présente des risques importants pour les populations civiles ukrainiennes, déjà menacées par des bombardements, frappes de Shahed ou encore missiles. La ville de Kramatorsk, qui comptait environ 200 000 habitants avant la guerre (un chiffre depuis amputé de moitié, selon Reuters), et celle de Sloviansk, deux maillons de la « ceinture de forteresses » que la Russie doit conquérir pour obtenir le contrôle de la région de Donetsk, sont particulièrement à risque, au vu de leur proximité du front.
D’autant que, comme le montre la transmission vidéo du drone utilisé par Moscou contre Kramatorsk, les images reçues par l’opérateur de l’engin piloté à distance sont très claires et permettent des frappes précises, là où un modèle utilisant des ondes radios transmet une vidéo bien plus floue de manière intermittente.
De quoi pousser certains, comme Serhii Sternenko, créateur d’une fondation qui a permis de financer l’achat de plus de 200 000 drones pour les forces armées ukrainiennes, à appeler au verrouillage de la zone. « Dès à présent, toutes les localités de cette zone doivent fermer les routes avec des filets anti-drones, limiter la circulation des civils dans les rues et commencer progressivement les mesures d’évacuation », a affirmé ce dernier sur X : « il n’y a pas réellement d’arrière à 30 kilomètres du front ».
