C’est un incident qui, « à trois mètres près », aurait pu se transformer en une catastrophe. Le 21 septembre dernier à l’aéroport de Nice, un appareil de la compagnie Nouvelair se prépare à atterrir en piste 04L (left). En recevant une alerte, le contrôleur aérien en charge de l’approche aurait interrogé l’équipage en provenance de Tunis (Tunisie), pour confirmer 04L. Malgré ses croyances, le pilote à bord de l’aéronef s’apprête à poser ses roues en 04R (right), la piste la plus à droite, réservée… aux décollages.
En une fraction de seconde, ce n’est plus l’approche d’un avion que le contrôleur dirige, mais l’approche d’un désastre. Car en piste 04R, un avion d’EasyJet s’est aligné. Il est sur le point de s’élancer pour décoller. Grâce aux instruments d’urgence de l’aéroport – avertisseurs visuels et sonores destinés à la tour en cas de piste occupée – le contrôleur aurait ordonné au Nouvelair la remise des gaz et l’interruption de la procédure d’atterrissage.
Accusations, traumatisme et interdiction de témoignage
La suite, nous la connaissons : la catastrophe pour les membres d’équipage et les passagers a été évitée, mais en public, ce sont les aiguilleurs du ciel qui sont pointés du doigt. Quelques jours après, le 1er octobre, le maire de Nice Christian Estrosi dénonçait un comportement inadmissible et prévenait que, lors de la « prochaine session du conseil municipal, je proposerai à l’État français de bien vouloir nous remplacer les contrôleurs aériens par des militaires ».
Une prise de parole saugrenue et précipitée en l’absence des conclusions de l’enquête, qui n’a pas aidé non plus dans le traumatisme occasionné par cet événement au sein des contrôleurs. La DGAC l’évoquait dans un communiqué, en précisant qu’une partie du personnel était indisponible temporairement « suite à l’incident ». Par ailleurs, elle ajoutait que ses effectifs étaient « tendus », certainement en l’absence de leur droit de témoigner sur l’affaire en public.
Un aperçu des deux pistes de l’aéroport de Nice vu depuis le ciel. © Shutterstock / Luziana5588 Un contrôleur témoigne, et soulève un détail clé concernant l’éclairage des pistes
L’un des contrôleurs qui n’était pas dans la tour à Nice ce soir-là, mais qui s’appuie sur une expérience d’une dizaine d’années, a décidé de rompre le silence et parler au micro de France 3 Côte d’Azur. Présenté sous le prénom de Pascal, ce dernier souligne un détail qui pourrait expliquer beaucoup de choses sur la confusion ce soir-là. En cause, une différence d’intensité lumineuse entre les deux pistes parallèles à l’aéroport de Nice.
Pour mieux appréhender ce détail qui pourrait ne pas en être un, un pilote de ligne a envoyé une vidéo à Presse-citron. En phase d’approche quelques jours après le drame évité, au moment de s’aligner en piste 04L, la vue depuis le cockpit de nuit révèle bien le contraste entre la piste gauche et droite. Celle de droite, qui a troqué ses anciennes ampoules par des LED dernier cri, est bien mieux éclairée. Au point d’oublier la présence de la piste 04L, ou du moins de la relayer au second plan.
À la tour de contrôle de l’aéroport de Nice, distinguer l’alignement d’un avion en piste 04L ou 04R est presque impossible. Depuis leur position, perpendiculaire aux pistes, les contrôleurs ne peuvent distinguer de nuit si un appareil vise l’une ou l’autre, séparé de 300 m (contre 700 m généralement), alors que la procédure empruntée par les avions est la même également, avec le survol de la baie de Cannes et le passage au-dessus du Cap d’Antibes.
L’équipage aux commandes du Nouvelair aurait pu voir le EasyJet aligné sur la piste, « même si de nuit, ce n’est pas simple à sa décharge », déclarait Pascal à France 3. La véritable difficulté reste donc cette différence de luminosité entre les deux pistes, qui peut fortement prêter à confusion. Pascal n’en venait pas à expliquer l’incident par ce détail, mais l’ajoutait parmi les « facteurs contributifs ».
La luminosité des pistes à Nice, un «facteur contributif » remonté par les pilotes
Avec l’ensemble des normes de sécurité et des différentes menaces dans l’aéronautique, une catastrophe résulte généralement de plusieurs « facteurs contributifs ». Mais il est certain que, pour Pascal, « les pilotes se plaignent depuis plus de 6 mois d’une différence d’intensité lumineuse dans le balisage des pistes de Nice », alors que les travaux de rénovation n’ont pas fini et que l’harmonisation des nouvelles technologies d’éclairage dans l’aéroport ne devrait pas être actée avant 2 ans.
Le contrôleur témoignait d’ailleurs que « ce type de confusion a déjà eu lieu », au cours de l’été, alors que l’aéroport faisait décoller et atterrir les avions dans l’autre sens (depuis la baie de Nice pour les atterrissages), en 22L et 22R.
À la parution de l’article de France 3, la direction de l’aéroport se défendait de ne pas avoir eu d’écho quant à cette précédente confusion il y a deux mois, et maintenait que l’ensemble du balisage des pistes était avec des LED. La vidéo envoyée à Presse-citron ce jeudi montre pourtant bien la différence de luminosité d’une piste à l’autre, vue depuis un avion en phase d’atterrissage en piste 04L.
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