Longtemps, l’incertitude a régné. Depuis la promesse d’Emmanuel Macron en 2021, la Maison des mondes africains (MansA) a envisagé de s’installer dans les anciens locaux de la fondation Cartier, boulevard Raspail, au sein de la Monnaie de Paris, quai Conti… Finalement, c’est dans un ancien atelier de couture du 10e arrondissement qu’elle a ouvert ses portes le 4 octobre, dévoilant un espace de 800 m2 sur trois étages, revu par les jeunes architectes Meriem Chabani et Mélissa Dyminat. Enfin !

Si cet emplacement est provisoire – elle restera deux ans dans ce quartier populaire de la capitale, nettement moins bourgeois que ceux qui avaient d’abord été envisagés –, la MansA ne boude pas son plaisir d’avoir trouvé un toit. Celle-ci ouvre ses portes avec une exposition-installation d’une artiste émergente, Roxane Mbanga, 29 ans, laquelle a pris au pied de la lettre la notion de « maison » pour imaginer la sienne, et donner naissance à un refuge, un « environnement enveloppant où les corps non-blancs se retrouvent un peu chez eux », afin de « faire de la place à ceux qui n’en ont jamais eu », a-t-elle expliqué lors de la visite inaugurale.

Une exposition inaugurale aussi intime qu’universelle

Pour ce faire, l’artiste a travaillé durant trois semaines dans un atelier au sous-sol du bâtiment, que l’on peut visiter pour y voir ses outils, ses notes et autres œuvres en cours, l’artiste restant sur place jusqu’à la fin de l’exposition. Entourée d’une équipe d’une quinzaine de personnes, elle s’est emparée ici du moindre centimètre carré disponible – avec, au sol, des tapis ; au mur, de grands portraits textiles de sa grand-mère, de sa mère et d’elle-même. Dans des cadres disséminés ici et là, on observe des photos de famille ; et, dans la bibliothèque de la MansA, des livres venus de sa propre collection se glissent parmi ceux de la jeune institution.

Roxane Mbanga dans les locaux de la Maison des mondes africains pour la préparation de l’exposition « NOIRES »

Roxane Mbanga dans les locaux de la Maison des mondes africains pour la préparation de l’exposition « NOIRES », 2025

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© Mariette Kouame / MansA

L’atmosphère est douce, domestique, accueillante. On a d’emblée envie de s’asseoir pour bouquiner, de revenir pour y laisser jouer les enfants (des jeux de société africains dits mancalas sont disponibles, en plus des bandes dessinées, de romans et de livres d’art)… Pour autant, il y a beaucoup à voir. L’artiste a profité de sa résidence entre ces murs pour revisiter « en profondeur certaines techniques, comme celles du batik », une teinture à la cire qu’elle a utilisée pour colorer les grands pans textiles qui ornent l’espace dès l’entrée. Elle a aussi réparti dans l’espace des archives vidéo autour des femmes au sein du mouvement Coupé-Décalé en Côte d’Ivoire.

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Un espace décloisonné

Outre l’exposition, la MansA – dont le nom et le logo en couronne ont été choisis en hommage au roi du Mali Mansa Musa – révèle pour son ouverture un espace décloisonné, dans tous les sens du terme, où s’enchaîneront les lectures, les expos (toujours courtes), les concerts, les conférences, et d’où l’on aperçoit l’équipe travailler à l’étage… Le sous-sol, quant à lui, se transformera dans les prochaines semaines en incubateur, hébergeant « 12 projets autour des mondes africains » (mode, médias, podcast…), nous explique Imane Lehérissier, chargée de programmation.

Portrait de Elizabeth (Liz) Gomis

Portrait de Elizabeth (Liz) Gomis, 2025

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Dans cette maison qui réussit le pari d’être à la fois très accueillante (le choix de l’artiste y est pour beaucoup) et engagée, on sent aussi nettement la personnalité forte et déterminée de sa fondatrice Liz Gomis, journaliste et réalisatrice de documentaires comme Africa Riding sur Arte. Laquelle précise la double mission, déjà bien affirmée, du lieu, entre soin des blessures et joie pure d’exister, de nouer fierté et inventivité : « Transmettre, non plus seulement des traumas, mais des forces. Ne pas nommer les brèches et les absences, mais les faire renaître par la création contemporaine vivante, puissante et indocile. »

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Roxane Mbanga. Noires

Du 4 octobre 2025 au 26 octobre 2025

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