C’est qui ?

Solveig Touzé est la cogérante de la librairie La Nuit des temps, quai Émile-Zola, qu’elle a créée en 2017 avec Ayla Saura. La jeune Angevine est également co-créatrice du festival de littérature féministe, Dangereuses lectrices, qui se déroule les 18 et 19 octobre à l’Antipode. Licenciée en lettres option Métier du livre, elle s’est distinguée, le 10 septembre, en organisant le soutien de dizaines de commerçants du centre-ville au mouvement Bloquons tout.

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Jusqu’au 10 septembre, Solveig était surtout connue des habitués du quartier et des militants engagés sur les questions de féminisme. Depuis, elle est devenue, avec la co-créatrice de la librairie La Nuit des temps, Ayla Saura, et Bérangère De Clerck, gérante de Ma joyeuse épicerie, le symbole des luttes chez les commerçants. « On a posé la question à tous les commerçants du centre-ville pour savoir s’ils voulaient fermer en solidarité avec les bloqueurs. Beaucoup voulaient le faire, mais ne se sentaient pas d’y participer seuls. Finalement, on a mis en place un groupe sur Instagram et une cinquantaine de commerçants nous ont suivis. »

Mixité choisie

Si Solveig organise, via le festival Dangereuses lectrices, des ateliers en non-mixité choisie, sa librairie est un vrai lieu de mixité. De genre, mais aussi sociale et intellectuelle. « On a aussi bien des personnes âgées du quartier qui viennent acheter le dernier Musso que des lectrices engagées qui cherchent un essai féministe. » C’est surtout le rayon littérature qui porte la librairie. Parfois, des passerelles se créent. « Le fait d’être généraliste permet d’avoir une approche en sous-marin. Je pense à des femmes qui ont choisi le roman Le chœur des femmes. Il leur a donné envie de creuser la question et elles se sont intéressées aux sciences humaines et au féminisme. »

Dangereuse patronne

Co-créatrice du festival de littérature Dangereuses lectrices, qui se déroule mi-octobre, Solveig est aussi une patronne. Pourquoi dangereuse ? « Parce qu’une femme qui lit a le savoir. Et une femme qui sait, c’est dangereux. » Et une patronne engagée, c’est grave ? « Être humaniste, patron ou pas, ça devrait être normal. On paye des cotisations, on paye pour que tout le monde soit soigné, aille à l’école… Je trouve ça juste normal. Dans nos métiers, on parle aux gens, on va vers les autres, notre activité dépend des autres. Pourquoi serait-on égoïste ? »

Mouton noir ?

En avril Solveig témoignait dans Le Mensuel tout son amour pour la Vilaine et tout le mal qu’elle pensait du parking Vilaine et de la voiture en centre-ville. Une position peu orthodoxe dans le Landerneau des commerçants du quartier. De là à passer pour le mouton noir ? « Je ne pense pas. On peut être commerçant et engagé. Il y a juste un narratif qui dit qu’être commerçant et de gauche, ce n’est pas possible. C’est à nous de changer ce narratif. Ce n’est pas parce qu’on vend des produits et des services qu’on n’est pas tournés vers l’humain et les problématiques environnementales. »

Un père prof de sport, une mère infirmière, Solveig a baigné dans un univers de lutte pour la défense des fonctionnaires. Elle s’engage, dès 2006, dans le blocage de son lycée contre le CPE. Quand elle arrive à Rennes, en 2014, elle se sent comme un poisson dans la Vilaine (même si on ne se risquerait pas à donner l’espérance de vie d’un gardon dans notre fleuve bien aimé). « Être à Rennes, c’est génial, il y a une belle émulation culturelle, militante… » Et on y croise de gros poissons, comme Guillaume Meurice qui a revêtu le costume de libraire en septembre 2024. « Il est bon comme libraire, mais il passe trop de temps à discuter et à signer des livres. » À bon entendeur.