En clôture des 31 e rencontres internationales de la sénologie , qui se tenaient à Strasbourg du mercredi 8 au vendredi 10 octobre, l’équipe de la P re Carole Mathelin a divulgué en avant-première les résultats préliminaires d’une étude très attendue de l’impact de l’environnement sur le cancer du sein. « La France est le premier pays au monde en termes d’incidence du cancer du sein et c’est une première place dont on ne veut pas », a résumé ce vendredi la scientifique, qui s’est intéressée aux causes de cette maladie tuant « 12 000 femmes chaque année » dans notre pays.
« Les causes principales du cancer du sein sont connues : il s’agit de l’obésité, surtout après la ménopause, de la sédentarité, de la consommation d’alcool et d’autres facteurs comme la carence en vitamine D, le manque de sommeil, des causes génétiques ou hormonales », détaille Carole Mathelin. « Mais cela n’explique pas tout. Et surtout pas pourquoi certaines femmes jeunes, non sédentaires, qui ne boivent ni ne fument développent cette maladie ». Le cancer du sein étant hormono-dépendant, la P re Mathelin s’est intéressée aux perturbateurs endocriniens, dont elle a mesuré la concentration dans les tissus prélevés sur 931 patientes suivies à l’ Icans.
« On se contamine au fur et à mesure »
Séparés en trois familles – pesticides, Pfas ( ou polluant éternels ) et métaux – ces perturbateurs endocriniens ont été retrouvés en quantité bien plus importante dans les tumeurs cancéreuses que dans les tumeurs bénignes, ce qui montre bien, selon la scientifique, qu’il « se passe quelque chose » entre perturbateurs et cancer du sein.
Logiquement, les femmes les plus âgées avaient des concentrations plus élevées de métaux, de pesticides et de Pfas que les plus jeunes, ce qui prouve « qu’on se contamine au fur et à mesure du temps ». De manière moins intuitive, les scientifiques ont découvert que les femmes minces avaient des taux plus importants de métaux et de Pfas que les patientes obèses. À l’inverse, ces dernières sont celles qui ont les concentrations de pesticides les plus importantes.
Des Pfas chez 96 % des patientes
Un autre enseignement de l’étude, bien plus inquiétant, porte sur les Pfas, présents chez 96 % des patientes de la cohorte. Deux d’entre eux, les Pfos et les Pfoa sont présents en plus grande quantité dans « les tumeurs triples négatives, ces cancers qu’on ne connaissait pas il y a encore quarante ans et qu’on voit aujourd’hui apparaître de plus en plus fréquemment, notamment chez des femmes jeunes », note Carole Mathelin. Ces nouveaux cancers ont des « pronostics moins bons et sont plus difficiles à traiter ».
Du plomb à Mulhouse
En s’intéressant aux lieux de résidence des patientes, les scientifiques ont également constaté des liens nets entre concentration de certains perturbateurs et contamination des sols sur place. « Les patientes de Moselle, à Florange, Hayange, ont par exemple beaucoup de plomb dans leur tumeur… Autour de Mulhouse aussi » observe Carole Mathelin, qui espère que l’étude contribuera aussi à éclairer les décideurs locaux.