Trois lettres pour un nom de scène, trois lettres qui pétillent, qui provoquent, qui claquent. Trois lettres qui racontent un parcours de chanteuse pop, de comédienne, et un cheminement de femme. Tristan Le Guillou a réalisé un portrait attachant de Lio, alias Vanda, son vrai prénom. Un portrait qui embrasse sa carrière, mais aussi sa vie privée et le regard qu’elle pose sur toutes ses expériences.
Lio, cheveux très courts, enregistre son nouvel album en même temps que se déroule le temps du portrait. Un album qu’elle a pu monter grâce à un financement participatif sur Internet et qu’elle a choisi de construire uniquement avec des femmes. « Je suis entourée de femmes, parce qu’elles m’ont ramenée à la musique et ramenée à la vie. Des femmes m’ont aimée et elles m’ont protégée. Les hommes ne m’ont pas aimée. Ils m’ont avilie et dominée », déclare-t-elle.
Et sa parole, depuis 2006, est écoutée sur ce sujet : elle avait à l’époque, trois ans après la mort de Marie Trintignant, remis en place sur le plateau de Thierry Ardisson l’écrivaine Murielle Cerf, qui romantisait ce féminicide. Depuis, sa réflexion sur le sujet n’a cessé de se développer. Jusqu’à l’engagement, dans ses nouvelles chansons, dit-elle, mais aussi dans les actes, puisqu’on la voit participer à une manifestation de Femen, avec fierté.
Épreuves et mysogynie
Et il lui en a fallu, des épreuves et de la misogynie, pour en arriver là. D’abord à ses débuts, quand elle chante à 16-17 ans Banana Split, ce qui constitue soit une version moderne et entraînante des Sucettes de Serge Gainsbourg, soit une ode à la fellation, pour faire rire et vibrer les hommes aux dépens de ces très jeunes filles. « C’était un peu Baby Doll, un peu Lolita. On m’avait vendu que c’était cool. Et à 15-16 ans, on veut être cool », se remémore-t-elle. Cette chanson et sa mise en scène participent pourtant « à la construction d’un fantasme pédocriminel », constate la directrice de la rédaction des Inrockuptibles, Carole Boinet.
Les mauvais traitements, et les sous-entendus poisseux, elle ne va cesser de les croiser tout au long de sa carrière professionnelle. Ce qui ravive des blessures anciennes et une forme de révolte. D’abord parce que, raconte-t-elle, elle a été violée à 10 ans par un « ami de la famille ».
Mais aussi parce que, en femme avertie, elle a tout de suite constaté que le milieu du spectacle était « dangereux pour les femmes et les enfants ». Dans sa vie privée, elle l’a dit et redit, elle a aussi dû faire face à des violences conjugales aiguës. Elle a combattu judiciairement, avec détermination, mais on sent encore la peur dans sa voix. Cette même peur qui lui a fait troquer ses talons hauts pour des baskets, afin de pouvoir fuir. Un documentaire sensible, et l’évolution d’une conscience féministe.
Lio, France 4, 21 h 5, lundi 13 octobre 2025
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