Trente milles procédures judiciaires (dont la moitié ont un an, voire plus) s’entassent sur les bureaux des 390 enquêteurs strasbourgeois. Et près de 800 dossiers sont en attente de traitement aux mains d’une quinzaine de policiers à Haguenau et Sélestat. «  Chaque jour, un autre dossier se rajoute sur leurs piles  », déplore Emmanuel Georg, secrétaire départemental du syndicat Unité SGP Police 67. Lui et douze autres adhérents du syndicat vont à la rencontre des passants ce mercredi matin : « Tous ces services d’investigation, du bureau de police en passant par le groupe d’appui judiciaire (GAJ) et la division de la criminalité territoriale (DCT) sont en souffrance.  »

Les citoyens portent davantage plainte notamment pour les violences intrafamiliales. « On a facilité leur prise de parole – ce qui est une bonne chose -, mais on n’a pas augmenté la capacité de les traiter ensuite. » Conséquence pour les victimes : les délais de traitement s’allongent. « Elles se sentent abandonnées et perdent confiance. Elles ne savent même pas si la plainte est traitée », poursuit-il. Un de ses collègues échange avec deux vieilles dames : « On le sait, les petits dossiers ne sont pas traités immédiatement. Mais ces petits dossiers représentent de gros soucis aux plaignants », s’expriment-elles.

Des outils techniques « obsolètes »

Un autre syndicaliste estime que c’est la réforme, supprimant l’organisation traditionnelle de la police nationale, qui « a tué » la PJ : « Il nous manque des enquêteurs, et depuis deux ans, on traite des affaires qui ne sont pas de notre ressort. Ça a tué les spécialités. » Sans parler des outils techniques et informatiques qui sont « obsolètes ».

À l’échelle locale, la direction de la police prend en compte le problème, « avec une écoute bienveillante ». Pour Emmanuel Georg, c’est au niveau des « grandes instances parisiennes que ça bloque ». Ce dernier reçoit dans son bureau environ quinze collègues par an, exprimant leur volonté de changer d’air.