Par
Rédaction Rennes
Publié le
12 oct. 2025 à 15h24
Une veuve a demandé à la cour administrative d’appel de Nantes, jeudi 9 octobre 2025, de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Rennes pour avoir refusé en octobre 2022 de « prolonger la conservation des gamètes » qui avait été déposés en 2019 par son défunt époux au Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humain (Cecos).
Rosine souhaite en effet « en disposer », mais avait été déboutée en première instance par le tribunal administratif de Rennes, en avril 2024. Elle avait alors fait appel pour faire censurer cette « atteinte disproportionnée » à son « droit au respect de la vie privée et familiale », consacré par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Le décès survenu un mois avant l’implantation
Rosine voulait en particulier qu’il soit fait « injonction » au Cecos de « prendre toutes mesures utiles pour conserver les paillettes » de son mari décédé et « permettre l’exportation vers un établissement de l’Union européenne qui accepterait de pratiquer une procréation médicalement assistée ».
Cet homme « en soins palliatifs » était décédé le 12 mai 2021 alors qu’une « implantation » était prévue « au mois de juin 2021 » dans le cadre d’un « projet parental ».
« L’assistance médicale à la procréation est destinée à répondre à un projet parental », encadre le code de la santé publique. « Tout couple formé d’un homme et d’une femme, ou de deux femmes ou toute femme non mariée, ont accès à l’assistance médicale à la procréation. »
Le décès fait « obstacle » à l’insémination
« Cet accès ne peut faire l’objet d’aucune différence de traitement, notamment au regard du statut matrimonial ou de l’orientation sexuelle des demandeurs », prend bien soin de préciser la loi.
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« Les deux membres du couple […] doivent consentir préalablement à l’insémination artificielle ou au transfert des embryons. » Le « décès d’un des membres du couple » fait « obstacle » à toute « insémination » ou à tout « transfert des embryons », souligne encore le code de la santé publique.
« La personne dont les gamètes ont été […] conservés dans le cadre d’un […] projet parental […] est consultée chaque année […] sur le point de savoir si elle souhaite maintenir cette modalité de conservation », ajoute le texte.
« Si elle ne souhaite plus la maintenir, ou si elle ne remplit plus les conditions d’âge […] elle peut consentir […] à ce que ses gamètes fassent l’objet d’un don. […] Il est mis fin à la conservation […] en cas de décès de la personne si elle n’a pas exprimé, avant son décès, le consentement. »
« L’importation et l’exportation de gamètes […] sont soumises à une autorisation délivrée par l’Agence de biomédecine, conclut enfin le code de la santé publique. Elles sont exclusivement destinées à permettre la poursuite d’un projet parental, […] à l’exclusion de toute finalité commerciale. »
« L’exportation de gamètes déposées en France […] est interdite si elles sont destinées à être utilisées, à l’étranger, à des fins qui sont prohibées sur le territoire national », avait ainsi reformulé en première instance le tribunal administratif de Rennes.
« Est notamment interdite en France l’insémination artificielle, en cas de décès du conjoint ayant procédé à la conservation de ses gamètes en vue d’une procréation artificielle, […] par le membre du couple survivant. »
Une réglementation « incohérente »
« Si Mme X. justifie d’un projet parental, les attestations des proches et médecins produites ne permettent pas d’établir que son défunt époux avait explicitement consenti à l’utilisation de ses gamètes après son décès », avait-il conclu.
« En outre, Mme X. est de nationalité française et n’entretient aucun lien avec un pays étranger dont elle envisagerait qu’il soit importateur des gamètes. […] La décision […] ne porte pas une atteinte manifestement excessive au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante. »
Jeudi 9 octobre 2025, le rapporteur public a proposé à la cour administrative d’appel de Nantes d’enfoncer le clou : le « consentement » du mari de Rosine n’est « pas établi » par les pièces du dossier, a-t-il répété. Il n’avait par ailleurs « pas conscience de l’imminence de son décès » lorsqu’il a renouvelé sa demande de conservation de ses gamètes, selon lui.
L’avocate de Rosine s’est dit « consciente du problème juridique » posé aux juges nantais par ce dossier, mais les a appelés à tenir compte de la « situation humaine » de cette femme « soumise à l’incohérence de la réglementation » française : la loi l’autorise en effet à élever seule un enfant » d’un « donneur inconnu », mais pas de son défunt mari.
L’avocat du CHU de Rennes s’est quant à lui simplement « rapporté » aux mémoires écrits déjà déposés dans cette affaire. La cour administrative d’appel de Nantes, qui a mis sa décision en délibéré, rendra son arrêt dans quinze jours environ.
GF (PressPepper)
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